Bon, pour ceux du forum qui se sont enfilés beaucoup de cinéma américain classique...
Je suis à la recherches de films hollywoodiens du code (à partir de 1934, donc) qui traiteraient d'un sujet justement tabou du code : je pense à la prostitution, car c'est un cas d'école, mais ça peut être n'importe quel autre sujet (adultère, viol, crime...) tant que ça met en lumière la façon dont le film le traite.
Il y a évidemment les comédies Lubitschiennes et le sexe, mais c'est dans un rapport au code un peu joueur, un peu malin et conscient, qui est déjà autre chose : j'essaie plutôt de trouver un film qui épouse pleinement la pensée du code, du genre grand mélo MGM étincelant, qui prouve que le ciné hollywoodien d'alors peut traiter de n'importe quel sujet dès qu'il l'abstrait un peu. Du coup (encore une contrainte), tout ce qui joue déjà comme un début de remise en question dépressive ou maniériste de cette grande forme hollywoodienne (les films noirs, les mélos sirkiens) serait des exemples un peu moins pertinents. Je pense que plus le film est proche de 34, mieux c'est.
Voilà, y a plus de contrainte que le newbie qui veut des films sur le joint de culasse Corteco 411832P...
En fait j'en avais un sous la main, La valse dans l'ombre de Mervin Leroy (1940), mais le film est pas assez bon.
Découvert ça récemment (visible sur you tube en plusieurs parties), un film catastrophe indé acheté par RKO prétexte à une grosse intrigue à base de ménage à trois, mais c'est juste avant le code Derniers feux...
Il s'agit du code Hays qui définissait ce qui était permis de montrer, moralement parlant, dans un film. Pas de sexe, de nu, de violence, de glorification du mal sous toutes ses formes, etc ... Bref, le puritanisme dans sa plus belle expression.
Je vais peut-être dire une bêtise, la dernière de l'année promis , mais le personnage de gangster irrécupérable qu'a incarné James Cagney est parvenu à l'effet inverse voulu par le code vu les succès de ses films. Même si ces derniers devaient respecter le code, Cagney y a gagné là une popularité contre-productive par rapport à l'objectif voulu.
_________________ "Le cinéma, c'est le sang, les larmes, la violence, la haine, la mort et l'amour" Douglas Sirk
Heeey bien vu pour Camille, ça a l'air de bien correspondre. Et en plus c'est MGM !
Léo a écrit:
Ce n'est pas mon domaine de compétence mais évidemment il y a New-York Miami pour l'adultère, avec le coup de drap qui sépare les lits, et qui tombe à la fin, suggérant que l'adultère est consommé (ce qui a provoqué un scandale).
Oui j'utilise déjà la scène en cours, mais justement pour parler de la transition (le film sort tout juste à la limite de l'application, et cette scène est un peu le manuel d'utilisation officiel, ou peut-être aussi une façon de dire : c'est bon, on est près).
Le code de production, c'est le code Hays, qui est décidé d'un commun accord avec les patrons en 1930, mais qui n'est appliqué obligatoirement qu'en 1934. Du coup les réals ont le temps de voir venir, ce qui est explique à la fois le défoulement des films pré-code (relativement explicites, immoraux, sexués), mais aussi la progression très maîtrisée vers une forme qui pourra continuer à parler de ces sujets malgré les contraintes du code, puis finalement grâce aux contraintes du codes. La scène de strip-tease de Gilda, 12 ans après l'application du code, peut être vu comme la démonstration fière du pouvoir des réalisateurs (un spectacle donné devant le mari / les censeurs).
Concrètement, le code c'est des interdits d'objets, de mots. D'où le fait que la forme devient quelque peu abstraite, ça ne fait plus sens que via le cadre, l'axe, c'est tout. Ça donne un cinéma très pur (là où le précode, via le début du parlant, était retombé dans quelque chose de presque naturaliste). Le code entier si ça t'intéresse :
Code de production
« Si les films présentent des histoires qui affecteront des vies pour le mieux, ils peuvent devenir la force la plus puissante pour l'amélioration de la condition humaine. » Le sénateur Hays
Les producteurs de films reconnaissent que le cinéma est une forme universelle de divertissement et que les spectateurs du monde entier leur accordent une grande confiance. Cette confiance fait en sorte qu'ils reconnaissent leur responsabilité vis-à-vis du public parce que le divertissement et l'art sont des influences importantes dans la vie d'une nation. Malgré le fait que le cinéma est principalement un divertissement sans aucun but d'enseignement ou de propagande, ils reconnaissent que le cinéma peut être directement responsable du progrès spirituel ou moral. Pendant la transition rapide du cinéma muet aux films parlants, ils ont compris la nécessité de souscrire à un code d'éthique pour guider la production de films et ainsi affirmer à nouveau leurs responsabilités. Ils demandent au public de faire preuve d'une bonne compréhension de leurs buts et problèmes en démontrant un esprit de coopération qui leur permettra la liberté et l'occasion nécessaire d'élever le cinéma à un niveau toujours plus haut de divertissement sain pour tous.
Principes généraux
1. Aucun film ne sera produit qui porterait atteinte aux valeurs morales des spectateurs. La sympathie du spectateur ne doit jamais être jetée du côté du crime, des méfaits, du mal ou du péché.
2. Seuls des standards corrects de vie soumis aux exigences du drame et du divertissement seront présentés.
3. La loi, naturelle ou humaine, ne sera pas ridiculisée et aucune sympathie ne sera accordée à ceux qui la violent.
Applications particulières
I. Crimes Ils ne seront jamais présentés d'une façon qui créerait de la sympathie pour le criminel ou inspirer au spectateur un désir d'imitation.
1. Meurtre : a. La technique du meurtre doit être présentée de manière à ne pas encourager l'imitation. b. Des meurtres brutaux ne doivent pas être présentés en détail. c. La vengeance n'est pas justifiée dans un film où l'action se passe dans l'époque contemporaine.
2. Les méthodes criminelles ne doivent pas être explicitement présentées. a. Les techniques pour le vol, le cambriolage et le dynamitage de trains, de mines, de bâtiments, etc., ne doivent pas être présentées en détail. b. L'incendie criminel doit être soumis aux mêmes sauvegardes. c. L'utilisation d'armes à feu doit être limitée. d. Les méthodes utilisées dans la contrebande ne doivent pas être présentées.
3. Le trafic de la drogue ne doit jamais être présenté.
4. On ne montrera pas la consommation de spiritueux dans la vie américaine, sauf dans les cas où cela fait partie intégrante du scénario ou des caractéristiques d'un personnage.
II. Sexe L'institution du mariage et l'importance de la famille sont primordiales.
1. L'adultère, parfois nécessaire dans le contexte narratif d'un film, ne doit pas être présenté explicitement, ou justifié, ou présenté d'une manière attrayante.
2. Les scènes de passion : a. Elles ne doivent pas être présentées sauf si elles sont essentielles au scénario ; b. Des baisers excessifs ou lascifs, des caresses sensuelles, des positions et des gestes suggestifs ne doivent pas être montrés.
3. Séduction et viol : a. La suggestion est permise (rien de plus) et seulement lorsqu'il s'agit d'un élément essentiel du scénario. b. Ils ne sont jamais un sujet approprié pour la comédie.
4. Toute référence à la perversion sexuelle est formellement interdite.
5. La traite des blanches ne doit pas être représentée.
6. La présentation de rapports sexuels entre les personnes de race blanche et celles de race noire est interdite.
7. L'hygiène sexuelle et les maladies vénériennes ne sont pas des sujets appropriés au cinéma.
8. La naissance d'un enfant (même en silhouette) ne doit jamais être présentée.
9. Les organes sexuels d'un enfant ne doivent jamais être visibles à l'écran.
III. Grossièreté La présentation de sujets vulgaires, répugnants et désagréables doit être soumise au respect des sensibilités des spectateurs et aux préceptes du bon goût en général.
IV. Obscénité L'obscénité dans le mot, dans le geste, dans la chanson, dans la plaisanterie, ou même simplement suggérée est interdite.
V. Blasphème Le blasphème (incluant les mots God, Lord, Jesus, Christ, Hell, S.O.B, damn, Gawd) est strictement interdit.
VI. Costume 1. La nudité (réelle ou suggérée) est interdite ainsi que les commentaires d'un personnage à ce sujet (allusions à...). 2. Les scènes de déshabillage sont à éviter sauf lorsqu'il s'agit d'un élément essentiel du scénario. 3. L'indécence est interdite. 4. Les danses lascives et les costumes trop révélateurs sont interdits.
VII. Danses 1. Les danses qui suggèrent ou représentent des relations sexuelles sont interdites. 2. Les danses qui comportent des mouvements indécents doivent être considérées comme obscènes.
VIII. Religion 1. Aucun film ne doit se moquer de la religion sous toutes ses formes et de toutes les croyances. 2. Les ministres du culte ne peuvent pas être dépeints comme des personnages comiques ou comme des bandits. 3. Les cérémonies de n'importe quelle religion définie doivent être présentées avec beaucoup de respect.
IX. Emplacements La présentation de chambres à coucher doit être dirigée par le bon goût et la délicatesse.
X. Fierté nationale 1. La présentation du drapeau se fera toujours de manière respectueuse. 2. L'histoire des institutions, des gens connus et de la population en général d'autres nations sera présentée avec impartialité.
XI. Titres Des titres licencieux, indécents ou obscènes ne seront pas employés.
XII. Sujets répugnants Les sujets suivants doivent être traités avec beaucoup de prudence et de bon goût :
1. Les pendaisons et les électrocutions légales (punition d'un criminel). 2. La brutalité et l'horreur. 3. Le tatouage (marquer au fer) d'animaux et d'êtres humains. 4. La cruauté envers les enfants ou les animaux. 5. La vente des femmes et la prostitution. 6. Les opérations chirurgicales.
Je vais peut-être dire une bêtise, la dernière de l'année promis , mais le personnage de gangster irrécupérable qu'a incarné James Cagney est parvenu à l'effet inverse voulu par le code vu les succès de ses films. Même si ces derniers devaient respecter le code, Cagney y a gagné là une popularité contre-productive par rapport à l'objectif voulu.
Cela dit, en lisant les rapports de la commission Hays, j'ai été surpris de voir qu'ils étaient pas cons du tout, et très conscients de ce que les réalisateurs faisaient passer par sous-entendus. Bon, jusqu'à un certain point, hein, ils ratent des trucs, mais globalement ils sont assez lucides. On remarque aussi, en tout cas avant l'application (après ils semblent plus revenchards), qu'ils laissent passer des choses si ça va dans le bon sens moral (pour Le signe de la croix, par exemple).
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