Le truc troublant si sa réputation est notoire est qu'il a tourné avec des acteurs de plus en plus établis et bankables à chaque film...du coup il y a un malaise à lire un article aussi centré sur sa personnalité visiblement friable sans impliquer la production de façon plus générale. Pour Elève Libre ce n'étaient encore "que" des Belges peu connus en France
_________________ Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ? - Ce sont des fromages. On me les envoie de Calabre.
qui fait qu'une nana déjà violée monte une deuxième fois dans sa chambre.
J'admets qu'à force d'entendre des témoignages allant dans ce sens j'ai fini par l'admettre même si au départ intellectuellement et psychologiquement j'avais du mal à le comprendre.
Ça fait plaisir de constater ce genre de chose, car jusqu'ici, j'ai lu des propos de ta part assez durs sur le sujet. Comme quoi, la libération de la parole des victimes de violences sexuelles a bien au delà de sa fonction cathartique une vraie portée pédagogique dans nos sociétés.
l'article (voilà qui pourra alimenter l'aversion de Müller pour la psychanalyse je pense) :
Citation:
«Le monde du cinéma, y compris en Belgique, est trop souvent un monde où l’abus de pouvoir est perçu comme inhérent à la discipline.» Nous sommes le 9 mars 2024, au Théâtre national Wallonie-Bruxelles, lors de la 13e cérémonie des magrittes, l’équivalent belge des césars. Ces mots, la monteuse Sophie Vercruysse les prononce l’air grave, dans une vidéo projetée à la face du cinéma belge. Elle vient de recevoir le prix du meilleur montage pour le Syndrome des amours passées. «Un monde, reprend-elle, où l’exception culturelle a trop souvent mené à un aveuglement exceptionnel envers le rapport de force, l’emprise et la maltraitance. Un monde où les prédateurs peuvent en toute impunité abîmer hommes et femmes. Ce système doit prendre fin.» Quelques applaudissements, la cérémonie reprend : la puissance du discours n’a pas secoué la torpeur générale.
Deux mois plus tard, Sophie Vercruysse, 46 ans, s’installe à la terrasse d’un bar bruxellois, sous un timide soleil de printemps. La monteuse le confirme : sans être nommé, un réalisateur était visé. «C’était Joachim Lafosse. Je voulais qu’il puisse se reconnaître.» En vingt ans, elle a collaboré avec le cinéaste belge à six reprises, entre 2004 et 2015. Six films et autant de «cicatrices laissées dans [s] on cerveau». Pendant plusieurs semaines, elle a hésité à convenir d’un rendez-vous. Depuis qu’elle a décidé de parler, des crises de larmes la saisissent. Si elle prend la parole, c’est parce qu’elle n’est pas seule.
Une dizaine de femmes, scénaristes, actrices, techniciennes, dénoncent les conditions de travail sur les tournages de ses films, décrivant des faits pouvant s’apparenter à du harcèlement moral, du harcèlement sexuel, et à une agression sexuelle. Leurs témoignages recouvrent vingt ans de carrière. Si elles décident de parler aujourd’hui, c’est parce qu’elles ont vu «le système d’emprise», «le schéma de prédation», se répéter dans un silence assourdissant. Dans un email de douze pages adressé à Libération, le réalisateur a répondu à chacun des points soulevés par notre enquête et indique n’avoir «jamais cherché à heurter ni humilier intentionnellement qui que ce soit» : «Je n’ai jamais dénigré publiquement personne, j’ai pu être sec, stressé et angoissé mais pas humiliant.»
Se pencher sur les méthodes de Joachim Lafosse, c’est questionner une vision du cinéma centrée sur la figure du réalisateur, soutenu par des agents, des producteurs et des institutions. C’est aussi s’intéresser aux techniciens, machinistes, scénaristes, monteurs et regarder un angle mort de la réflexion actuelle sur l’état du cinéma. C’est enfin mettre la focale sur le cinéma belge francophone, où tout le monde se connaît. A 49 ans, il y est un réalisateur incontournable, l’un des plus prolifiques, l’un des plus primés et certainement l’un des plus influents : dix longs-métrages, des castings de stars, des récompenses et des sélections aux plus grands festivals, à Cannes, Venise, Saint-Sébastien ; il bénéficie du soutien financier de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de celui du Centre national du cinéma (CNC) pour son prochain film, les Petits Voleurs, actuellement en tournage.
«Le cinéma permet de parler de nous, sans dire que c’est nous», déclarait-il sur France Culture en janvier 2024, au moment de la sortie de son dernier film, Un silence. Il a filmé une équipe de tournage au bord de l’implosion, la désintégration d’un couple, les violences sexuelles subies à l’adolescence, la loi du silence dans les familles. Des sujets difficiles, pour un réalisateur qui a évoqué avoir été lui-même victime de violences sexuelles à l’adolescence, comme le personnage principal de son film Elève libre. Il a souvent mis sa vie dans ses films, s’est récemment confié dans la presse sur la bipolarité de son père, sujet au cœur des Intranquilles. Il a fait de la tension, la manipulation, la perversion et l’abus la matière première de son cinéma.
«Tu es transparente ! Tu n’existes pas !»
L’actrice Virginie Efira a travaillé avec Joachim Lafosse sur le film Continuer, sorti en 2019. «Ce fut probablement l’un des pires tournages de ma vie», dit-elle en préambule, décrivant «une équipe qui n’en pouvait plus». «C’est quelqu’un qui n’a accès qu’à une seule réalité, la sienne, incapable de se remettre en question, et une sorte de moteur viscéral à vouloir faire surgir la déstabilisation chez l’autre, à générer le conflit pour se sentir vivant, et probablement pour créer. Il va aller dans l’endroit de la transgression, pour vous mettre dans tous vos états, pour que vous soyez déstabilisée, infériorisée, ou en colère.»
Les tensions sur les tournages des films de Joachim Lafosse ont commencé dès le début de sa carrière. Au début des années 2000, Vania Leturcq a 21 ans lorsqu’elle devient première assistante réalisation de son deuxième long métrage, Ça rend heureux. Dès le premier jour, l’ambiance est tendue. «Il m’a crié devant toute l’équipe : “Tu es transparente ! Tu n’existes pas !” Suivent des «colères», des dénigrements. «Un jour, on tournait un plan-séquence en improvisation, on a atteint le sommet des crises : il s’est frappé au visage, puis est parti se recroqueviller au sol, la tête entre les mains. il pensait que nous étions tous contre lui.» Interrogé, Joachim Lafosse confirme : «Sur mes premiers films, atteint par l’angoisse, j’en suis arrivé là. Depuis 2009 j’ai entamé une thérapie qui m’a permis de mieux comprendre et de m’éloigner de cette souffrance. Je comprends que la vision de cette souffrance a dû être difficile pour ceux qui y ont assisté.»
Au fil des semaines, Vania Leturcq sent son corps la lâcher et souffre de problèmes gastriques. Si elle tient le coup, c’est aussi parce qu’elle espère être embauchée pour le film suivant. Sa carrière débute à peine. «Puisque personne n’avait été payé pour ce film, il nous faisait miroiter le film suivant : Nue Propriété, pour lequel il avait obtenu des financements.» Entre-temps, ils se croisent à nouveau et ont une relation sexuelle, sur laquelle elle cultive des souvenirs ambigus : «Après coup, je ne savais pas trop ce que je faisais là.» D’autres suivront, qu’il initie. Vingt ans plus tard, cette histoire lui semble relever de la zone grise : «Il me semble que j’ai toujours été consentante. Mais avec le recul, cette histoire me semble bien peu égalitaire et assez glauque.»
La deuxième assistante réalisatrice de Ça rend heureux, Valérie Houdart, est l’amie et la colocataire de Vania Leturcq. «Il avait parlé plusieurs fois du fait qu’il nous engagerait de nouveau, chacune au même poste, sur Nue Propriété. Un matin, Valérie m’a avoué que Joachim lui avait proposé le poste de première assistante, en lui demandant de ne rien m’en dire. Je pense qu’il ne m’a pas réengagée parce qu’on a couché ensemble.» Elle se souvient l’avoir croisé de nouveau des années plus tard, lors des Machins du cinéma – une cérémonie satirique qui précède les magrittes. Elle prépare alors son premier long métrage. «Il m’a dit : “En voyant ton court métrage j’ai bandé. Devant ton long, je veux éjaculer.”» Interrogé, Joachim Lafosse réfute avoir prononcé ces propos et affirme n’être pas «coutumier de ce type de vulgarité». Valérie Houdart accuse par ailleurs le réalisateur de faits qui peuvent s’apparenter à une agression sexuelle, pour lesquels elle a envisagé de porter plainte. Selon son récit, ils se sont déroulés la veille du premier jour de tournage de Nue Propriété. Elle avait alors 23 ans. «Nous sommes alors les deux derniers à travailler dans les bureaux. Joachim me plaque dans un coin, entre un mur et une porte et m’embrasse. Mécaniquement, je réponds à cette grosse langue dans ma bouche puis je m’enfuis en courant. Il essaie de m’appeler plusieurs fois. Je ne réponds pas.» Le réalisateur conteste : «Jamais de ma vie je n’ai plaqué qui que ce soit dans un coin entre deux portes pour l’embrasser de force.» Le lendemain, Valérie Houdart raconte être arrivée avec la boule au ventre : «Les trois premiers jours sont catastrophiques, on parle de me virer. Je fais des cauchemars tous les jours mais j’arrive au bout.» Un incident survient le dernier jour du tournage. Selon plusieurs témoins, Joachim Lafosse surgit derrière elle pour actionner une bouteille d’air comprimé dans son oreille – celles qu’on utilise pour nettoyer les caméras. La douleur est telle qu’un médecin vient sur le plateau. «J’ai eu un acouphène pendant deux ans, raconte-t-elle. Il revient encore quand je suis fatiguée ou trop stressée.» Au sujet de ce geste, le réalisateur indique s’être excusé «durant toute l’après-midi et la soirée» : «J’ai fait ce geste stupide et puéril sans aucune intention de faire le moindre mal à Valérie. Seulement partager ma joie de ce clap de fin.»
«Un film sur deux, ça se passait mal»
Malgré tout, et parce qu’elle loue encore aujourd’hui ses relations avec l’équipe du film, «soudée et soutenante», elle accepte de travailler sur le projet suivant, Elève libre. En 2007, le tournage s’apprête à démarrer et Joachim Lafosse est enthousiaste. «J’en ai marre de cette idée reçue du réalisateur démiurge et génial. Un film, c’est une collaboration», déclare-t-il alors dans la Libre Belgique.
Sur le tournage, l’ambiance est plus verticale, pesante. «Il hurlait, humiliait, créait le conflit exprès, L’ambiance était pesante.» Emilie Flamant, 21 ans, scripte, raconte : «Tous les postes clefs ont pleuré sur ce film. Moi aussi, je me réveillais la nuit, je rêvais que j’avais mal au ventre et j’avais en effet si mal au ventre. Je me suis mise à douter de moi.» Un jour, lors d’une séquence aux innombrables prises, voyant que la scène n’avance pas, elle se risque à lui donner un conseil. «Il m’a humiliée devant tout le monde en disant que je ne connaissais pas mon métier.» Des années plus tard, il la contacte pour lui proposer une nouvelle collaboration : c’est elle qui refuse. De son côté, après Elève libre, Valérie Houdart cesse également de collaborer avec lui.
La monteuse Sophie Vercruysse a travaillé avec Joachim Lafosse sur six films, de Folie privée (2004) aux Chevaliers blancs (2015). «Un film sur deux, ça se passait mal», résume-t-elle. Sur le tournage de Ça rend heureux, ils ont une relation sexuelle. «Juste avant le montage, il insiste pour qu’on ait une histoire, il me dit que je dois comprendre qu’il y a quelque chose de particulier entre lui et moi, et je le crois, même si je n’ai aucune envie de coucher avec lui. Après des mois d’insistance, je me dis : pourquoi pas ? Le lendemain, silence radio. Je rencontre une autre de ses collaboratrices, qui me raconte la même histoire que la mienne. Quand je l’appelle, il me répond qu’il a besoin de séduire toutes les femmes avec qui il travaille.» Interrogé sur l’ambiance sexualisée décrite par plusieurs de ses collaboratrices, le cinéaste conteste.
Le travail de montage est poussif, tendu et mal payé, dit-elle. Sur Nue Propriété, le réalisateur est de plus en plus agressif : «Lors d’une soirée où je fais la fête, il vient vers moi, hurle que je dois aller dormir, que demain je travaille et que je suis une pauvre fille, puis il part rageusement en me faisant un doigt d’honneur.»
Sans cesse, Lafosse souffle le chaud et le froid. Un jour, il lui hurle dessus en public, le lendemain, il dépose à son attention de petits cadeaux en salle de montage. Lors du tournage d’Elève libre, les choses dégénèrent définitivement. «Il me met la pression pour que j’aille dormir tôt, me fait des remarques désobligeantes sur mon travail quand il pense que c’est parce que je suis sortie la veille. Une autre de ses phrases fétiches dans le conflit, c’est : “Tu tiens le phallus, hein, t’es fière de le tenir, tu dois le lâcher.”» Elle se sent piégée, ne monte quasiment que ses films, se sent dépendante : «J’ai un peu peur de perdre mon boulot.» Sur le film suivant, A perdre la raison, la collaboration est chaotique. Encore plus sur les Chevaliers blancs : «Il ne vient jamais en montage, explique-t-elle. Par loyauté, je ne préviens pas la production de son absence. A un moment donné, un des comédiens fait une crise en disant que le film est mal monté. Joachim me fait porter le chapeau.» Pour se justifier, il lui ferait alors part de sa «théorie du fusible» : «Quand il a trop de pression, il fait sauter une personne entre lui et la pression. Cette fois, c’est moi. Après six films, je fais mes bagages.» Le réalisateur dément toute «théorie du fusible» : «Il est impossible de me reconnaître dans ces mots.»
Sur le tournage de l’Economie du couple, plusieurs de ses collaboratrices se souviennent de tensions, avec notamment «un nombre énorme» de prises pour une séquence où deux petites filles sont plongées dans un bain. L’une d’elles décrit : «Joachim Lafosse cherche à créer des conflits, tu te vois te trahir moralement et faire des choses que tu ne veux pas faire, pour quelqu’un que tu ne respectes pas.» Le premier assistant réalisateur est remplacé par Hélène Karenzo. Dès son arrivée, elle voit le cinéaste «péter des câbles, alors qu’il avait une équipe parfaite autour de lui.»
Sur le tournage de Continuer, Virginie Efira raconte avoir «pris une distance très forte avec lui», au point de ne plus lui parler : «Il essayait de me parler, je courais en disant, je ne peux pas te voir, je ne peux plus te voir ! C’était un des tournages les plus drôles dans le pathétisme. J’avais 40 ans, il ne pouvait absolument pas me virer, je suis une actrice déjà placée. Il m’a poussée à bout, mais tout le monde était contre lui, les producteurs n’en pouvaient plus. Il était en totale minorité. Il était, en fait, seul.» De son côté, Joachim Lafosse indique que sa relation avec Virginie Efira sur le tournage était «cordiale et respectueuse».
Questions sur la vie privée
A ce stade du récit, une question : qui garantit de bonnes conditions de travail et assure la santé et la sécurité des employés sur les tournages, et comment ? Si des obligations pèsent sur les producteurs, employeurs légaux des personnes recrutées pour un film, il ne faut pas négliger le rôle du réalisateur. «Sur un plateau, il est le supérieur hiérarchique, le n + 1 de l’équipe, il fait le relais entre elle et la production», résume Ghislain Gauthier, secrétaire général de la CGT spectacle. Seulement, l’économie du cinéma, son fonctionnement avec des missions courtes, induisant une précarité des contrats, fragilise ces salariés plus vulnérables. «La loi du silence domine. Les victimes ne s’expriment pas de peur d’être virées et blacklistées, poursuit-il. On se heurtera toujours à ces contrats pas protégés, et un secteur au début de la conscientisation de la santé au travail et la prévention.» Selon lui, des outils restent à inventer : «Une personne qui fait un signalement à la production devrait être protégée. On voudrait des droits à la représentation du personnel pour les intermittents sur les tournages, c’est-à-dire un délégué élu et salarié protégé, qui pourrait porter la voix de ses collègues auprès de la production.»
Jacques-Henri Bronckart, à la tête de la maison de production Versus, a accompagné les films de Joachim Lafosse pendant des années, d’Elève libre à Continuer. La manière de travailler du réalisateur, c’est «clairement la raison pour laquelle j’ai décidé de ne plus collaborer avec lui», dit-il. Il décrit lui aussi des tournages avec «pas trop de limites», un réalisateur qui a besoin de «foutre le bordel», avec qui il a eu de nombreuses altercations lors des tournages, «fait peser sur ses collaborateurs la réussite de ses séquences», a fait l’objet de nombreux recadrages, et qui «répète ad libitum ses erreurs». «Il y a des endroits où il a plus de prise que d’autres», ajoute Jacques-Henri Bronckart, évoquant les multiples scénaristes de ses deux derniers films. Il est en effet d’autant plus facile d’imposer sa loi dans un huis clos dédié à l’écriture d’un scénario ou en salle de montage, loin des regards.
Quand Joachim Lafosse a proposé à Juliette Goudot d’écrire un film à quatre mains, elle a d’abord ressenti «beaucoup de joie». En 2018, elle a 40 ans et un travail de journaliste et de critique de cinéma. Pendant quelques semaines, le travail avance, ponctué des considérations du cinéaste sur la psychanalyse : «Le travail du scénariste, c’est de sublimer la libido.» Un jour, il lui fait une «déclaration d’amour», pas réciproque. La relation se dégrade, il juge désormais ses idées «indignes d’une scénariste». Après trois mois, Juliette Goudot se met en retrait du projet. Huit scénaristes en tout seront finalement crédités pour les Intranquilles. De son côté, le réalisateur conteste toute dégradation des relations professionnelles après une déclaration d’amour ou des avances explicites faites auprès de certaines des «4 collaboratrices», calcule-t-il, pour qui il a développé «des sentiments autres que professionnels».
Après le départ de Juliette Goudot et d’une autre autrice, qui n’a pas souhaité s’exprimer publiquement, mais indique soutenir la parole des témoins, deux scénaristes débutantes sont recrutées comme stagiaires sur les Intranquilles. En 2019, Lou du Pontavice termine sa cinquième année d’études. L’auteur s’enferme dans son bureau, les jeunes femmes écrivent, avant de lui lire le résultat à voix haute. Au déjeuner, il pose «trop souvent» des questions sur leur vie privée, les compare l’une à l’autre, de «manière insidieuse». Au bout d’une semaine, Lou du Pontavice pense arrêter la collaboration qu’elle «pressent nocive», mais son amie et collègue la convainc de rester.
«Tout le monde rentre chez soi, bravo !»
Au bout d’un mois de stage non rémunéré, Joachim Lafosse leur propose de passer co-scénaristes. Le travail avance, ponctué de scènes étranges. Après la réponse positive d’une commission, il est question d’organiser une fête. «Il dit qu’il n’invitera pas nos mecs.» Les jours suivants, Joachim Lafosse les questionne sur leurs relations, leurs compagnons… «Ce à quoi ni moi ni elle ne répondons.» A la rentrée, sa co-stagiaire doit quitter le projet. Lou du Pontavice se retrouve seule avec lui.
«Je me souviens de la peur le matin en allant le retrouver, dit-elle. Je ne sais jamais sur quel pied danser, ni dans quelle humeur je vais le retrouver.» Il la reprend sur chaque mot, lui explique son travail «comme à une idiote», la «rabaisse continuellement». «Sous pression, le comportement de Joachim est sans limite et ouvertement sexiste.» Un point final est mis à une nouvelle version du scénario. La jeune femme se risque à lui dire qu’il est parfois «difficile» de travailler avec lui, qu’il est «agressif». Le réalisateur se met à «hurler», la traite d’«hystérique», de «molle». Quelques jours plus tard, elle annonce quitter le projet. «Il me répond qu’ils se passeront très bien de moi.» Joachim Lafosse conteste avoir traité quiconque de «molle» ou d’«hystérique».
En fin d’année, elle appelle le producteur du film, Anton Iffland Stettner de Stenola Productions, pour lui décrire ce qui s’est passé. «Il me demande s’il y a eu du harcèlement sexuel, je lui réponds que non, il a l’air soulagé.» Quelques jours plus tard, elle envoie un mail où elle indique que Joachim Lafosse a été «odieux et dégradant», ajoutant : «Les limites ont été largement dépassées.» Contactés, les producteurs n’ont pas donné suite à notre demande d’entretien.
Vient le tournage d’Un silence, sorti en 2024. Parmi les comédiennes recrutées, Lisa Debauche. Pour des raisons complexes, la jeune femme a une histoire familiale qui la lie à celle du cinéaste. Elle se pose des questions sur son histoire personnelle et sur son père décédé quand elle était encore enfant. Lorsqu’il lui propose un rôle dans son nouveau film, Un silence, inspiré de l’histoire d’un avocat belge médiatique condamné pour détention d’images pédopornographiques, elle accepte. Thème du film : le déni dans le cadre des violences intrafamiliales.
Après une séance d’essais pour les costumes, elle se retrouve seule en voiture avec Joachim Lafosse, qui revient sur leur histoire commune. «En mentionnant que mon père était l’ennemi de sa famille, précise-t-elle, ça me plaçait à un endroit où j’étais la fille de l’ennemie.» Elle lui dit être déstabilisée à l’idée de parler de cette histoire. «Il me répond : “Attention Lisa, tu ne vas pas toi aussi faire du déni.”» Les scènes sont tournées quarante, cinquante fois. «Je me sens vidée, épuisée, dénigrée.» Lors d’une prise, elle craque. Quelques jours plus tard, le cinéaste la rappelle : erreur de casting, fin de l’aventure. «Quand on se recroise à Bruxelles, il me dit que je ne suis pas la seule responsable de cette histoire.» En face, Joachim Lafosse incrimine «le contexte particulier», «les obligations de production», «les délais très courts», «le stress du tournage» qui ont été «des facteurs certainement destabilisants». L’actrice Louise Chevillotte la remplace.
Séquelles
Lors de son premier jour de tournage, cette dernière assiste à des «cris», des «propos tranchants et humiliants», une «incapacité à expliquer ce qu’il cherche à son équipe». «Au bout d’une quarantaine de prises, je souffle à ma partenaire que je n’en peux plus.» Son micro HF n’est pas coupé, le réalisateur l’entend. «Il sort de la salle où il regarde le combo, il applaudit pour féliciter “mademoiselle Chevillotte qui veut arrêter de travailler, alors je vais arrêter le cinéma, bravo, félicitations, il reste trois quarts d’heure mais tout le monde rentre chez soi, bravo !”» Le tournage est tendu, la nervosité se répercute sur toute la chaîne. Une machiniste n’a pas le temps de sécuriser un système d’éclairage : après une bourrasque, près de soixante kilos de matériel s’effondrent sur elle, l’envoyant aux urgences. Elle reprend le travail trois jours plus tard. «Elle a eu de la chance», confie un témoin de la scène. De son côté, le directeur de production Vincent Canart pointe les «contraintes budgétaires» imposées sur les deux derniers films du réalisateur, «la tension qui règne sur un plateau de tournage» et assure ne pas avoir été alerté de «problèmes graves» relatifs au comportement de Joachim Lafosse. «Il ne s’agit pas de défendre qui que ce soit, il y a un tas d’attitudes qui ne sont pas excusables. Mais il traîne une réputation qui, si elle n’est pas totalement injustifiée, me paraît largement exagérée.» Après le tournage, Louise Chevillotte alerte les producteurs belges du film, Stenola Productions. «Ils m’ont envoyé paître en me demandant si j’étais pour une uniformisation des réalisateurs.» En décembre 2023, un mois avant la sortie du film en salles, elle prévient la production française. Interrogé sur cette collaboration, il indique : «Je suis absolument désolé d’avoir fait traverser de telles difficultés à Louise. Je tiens à lui présenter à nouveau mes excuses et à lui exprimer mon désarroi.»
La sortie d’Un silence est un détonateur pour la majorité d’entre elles. Nous sommes début 2024, en plein #MeToo cinéma. Joachim Lafosse publie un long message sur les réseaux sociaux : «Et j’entends, et j’entends et j’observe et je pense à mon film Elève libre, à ce risque du lien pervers. A cette possibilité de l’emprise. […] Il semble donc qu’on découvre la libido débordante du pouvoir ! […] Il est dans notre profession, tout à coup, question du pouvoir, de sa possible jouissance, de son possible refus des limites. […] Il faut être costaud pour ne pas céder à la dévalorisation, à l’abrutissement, il faut lutter pour être autre chose qu’un objet. Il faut être costaud pour résister à la voracité de l’industrie du cinéma, il faut être très très costaud.» Le message circule entre anciennes collaboratrices du réalisateur, dont Valérie Houdart qui en la «nausée». Insoutenable paradoxe entre les vertus affichées et les souffrances vécues.
La réponse des producteurs à Louise Chevillotte arrive le 30 janvier 2024, par mail : «Croyez bien que nous sommes très soucieux de la nécessité de garantir et de maintenir une atmosphère et des conditions de travail respectueuses de chacun sur un plateau. […] Nous avons d’ores et déjà entamé, en concertation avec Joachim, une profonde réflexion qui sera suivie.» Le 2 avril 2024, nouveau mail : «Nous avons pris ensemble les mesures et précautions nécessaires, assuré une présence, protection et écoute en conformité fidèle avec la charte (référents acteurs et techniciens) afin d’assurer un tournage serein pour toutes et tous.»
Des années après les faits, les femmes qui témoignent évoquent les séquelles qu’a laissées leur collaboration avec Joachim Lafosse. Un temps, Emilie Flamant a pensé arrêter le métier de scripte pour vendre des bandes dessinées. Elle l’est finalement toujours, pour la RTBF. Vania Leturcq, elle, a le sentiment que son corps lui parle dès qu’elle est dans une situation de stress au travail. Sophie Vercruysse se décrit comme «en hypervigilance».
Actuellement, le réalisateur est en tournage dans le sud de la France. «Sur le film que je suis en train de tourner, nous écrit-il, j’observe l’apaisement qu’apporte aujourd’hui ces préoccupations de santé, de bien-être, de sécurité, dans la volonté collective de veiller à ce que des tiers questionnent la manière dont nous fabriquons des films». Eye Haïdara y joue le rôle principal. Elle remplace l’actrice Guslagie Malanda, laquelle indique, par la voix de son avocate, se trouver «à l’heure actuelle dans l’impossibilité de parler». Elle indique «soutenir les victimes». Le réalisateur, lui, dit prendre part «activement dans la pratique de mon métier aux évolutions magnifiques et fondamentales en ce qui concerne les violences sexistes et le bien-être au travail dans le cinéma».
La psychothérapie en général, et la psychanalyse en particulier, aura plus tendance à donner l'occasion à ce genre de types de rationaliser leur comportement, assimilier des concepts et devenir encore plus fourbes. Et un psychiatre, à part lui filer une ordonnance pour calmer ses angoisses, n'y pourra pas grand chose non plus. Irrécupérable. Faut juste le tabasser.
_________________ Looks like meat's back on the menu, boys!
l'article (voilà qui pourra alimenter l'aversion de Müller pour la psychanalyse je pense) :
Citation:
«Le monde du cinéma, y compris en Belgique, est trop souvent un monde où l’abus de pouvoir est perçu comme inhérent à la discipline.» Nous sommes le 9 mars 2024, au Théâtre national Wallonie-Bruxelles, lors de la 13e cérémonie des magrittes, l’équivalent belge des césars. Ces mots, la monteuse Sophie Vercruysse les prononce l’air grave, dans une vidéo projetée à la face du cinéma belge. Elle vient de recevoir le prix du meilleur montage pour le Syndrome des amours passées. «Un monde, reprend-elle, où l’exception culturelle a trop souvent mené à un aveuglement exceptionnel envers le rapport de force, l’emprise et la maltraitance. Un monde où les prédateurs peuvent en toute impunité abîmer hommes et femmes. Ce système doit prendre fin.» Quelques applaudissements, la cérémonie reprend : la puissance du discours n’a pas secoué la torpeur générale.
Deux mois plus tard, Sophie Vercruysse, 46 ans, s’installe à la terrasse d’un bar bruxellois, sous un timide soleil de printemps. La monteuse le confirme : sans être nommé, un réalisateur était visé. «C’était Joachim Lafosse. Je voulais qu’il puisse se reconnaître.» En vingt ans, elle a collaboré avec le cinéaste belge à six reprises, entre 2004 et 2015. Six films et autant de «cicatrices laissées dans [s] on cerveau». Pendant plusieurs semaines, elle a hésité à convenir d’un rendez-vous. Depuis qu’elle a décidé de parler, des crises de larmes la saisissent. Si elle prend la parole, c’est parce qu’elle n’est pas seule.
Une dizaine de femmes, scénaristes, actrices, techniciennes, dénoncent les conditions de travail sur les tournages de ses films, décrivant des faits pouvant s’apparenter à du harcèlement moral, du harcèlement sexuel, et à une agression sexuelle. Leurs témoignages recouvrent vingt ans de carrière. Si elles décident de parler aujourd’hui, c’est parce qu’elles ont vu «le système d’emprise», «le schéma de prédation», se répéter dans un silence assourdissant. Dans un email de douze pages adressé à Libération, le réalisateur a répondu à chacun des points soulevés par notre enquête et indique n’avoir «jamais cherché à heurter ni humilier intentionnellement qui que ce soit» : «Je n’ai jamais dénigré publiquement personne, j’ai pu être sec, stressé et angoissé mais pas humiliant.»
Se pencher sur les méthodes de Joachim Lafosse, c’est questionner une vision du cinéma centrée sur la figure du réalisateur, soutenu par des agents, des producteurs et des institutions. C’est aussi s’intéresser aux techniciens, machinistes, scénaristes, monteurs et regarder un angle mort de la réflexion actuelle sur l’état du cinéma. C’est enfin mettre la focale sur le cinéma belge francophone, où tout le monde se connaît. A 49 ans, il y est un réalisateur incontournable, l’un des plus prolifiques, l’un des plus primés et certainement l’un des plus influents : dix longs-métrages, des castings de stars, des récompenses et des sélections aux plus grands festivals, à Cannes, Venise, Saint-Sébastien ; il bénéficie du soutien financier de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de celui du Centre national du cinéma (CNC) pour son prochain film, les Petits Voleurs, actuellement en tournage.
«Le cinéma permet de parler de nous, sans dire que c’est nous», déclarait-il sur France Culture en janvier 2024, au moment de la sortie de son dernier film, Un silence. Il a filmé une équipe de tournage au bord de l’implosion, la désintégration d’un couple, les violences sexuelles subies à l’adolescence, la loi du silence dans les familles. Des sujets difficiles, pour un réalisateur qui a évoqué avoir été lui-même victime de violences sexuelles à l’adolescence, comme le personnage principal de son film Elève libre. Il a souvent mis sa vie dans ses films, s’est récemment confié dans la presse sur la bipolarité de son père, sujet au cœur des Intranquilles. Il a fait de la tension, la manipulation, la perversion et l’abus la matière première de son cinéma.
«Tu es transparente ! Tu n’existes pas !»
L’actrice Virginie Efira a travaillé avec Joachim Lafosse sur le film Continuer, sorti en 2019. «Ce fut probablement l’un des pires tournages de ma vie», dit-elle en préambule, décrivant «une équipe qui n’en pouvait plus». «C’est quelqu’un qui n’a accès qu’à une seule réalité, la sienne, incapable de se remettre en question, et une sorte de moteur viscéral à vouloir faire surgir la déstabilisation chez l’autre, à générer le conflit pour se sentir vivant, et probablement pour créer. Il va aller dans l’endroit de la transgression, pour vous mettre dans tous vos états, pour que vous soyez déstabilisée, infériorisée, ou en colère.»
Les tensions sur les tournages des films de Joachim Lafosse ont commencé dès le début de sa carrière. Au début des années 2000, Vania Leturcq a 21 ans lorsqu’elle devient première assistante réalisation de son deuxième long métrage, Ça rend heureux. Dès le premier jour, l’ambiance est tendue. «Il m’a crié devant toute l’équipe : “Tu es transparente ! Tu n’existes pas !” Suivent des «colères», des dénigrements. «Un jour, on tournait un plan-séquence en improvisation, on a atteint le sommet des crises : il s’est frappé au visage, puis est parti se recroqueviller au sol, la tête entre les mains. il pensait que nous étions tous contre lui.» Interrogé, Joachim Lafosse confirme : «Sur mes premiers films, atteint par l’angoisse, j’en suis arrivé là. Depuis 2009 j’ai entamé une thérapie qui m’a permis de mieux comprendre et de m’éloigner de cette souffrance. Je comprends que la vision de cette souffrance a dû être difficile pour ceux qui y ont assisté.»
Au fil des semaines, Vania Leturcq sent son corps la lâcher et souffre de problèmes gastriques. Si elle tient le coup, c’est aussi parce qu’elle espère être embauchée pour le film suivant. Sa carrière débute à peine. «Puisque personne n’avait été payé pour ce film, il nous faisait miroiter le film suivant : Nue Propriété, pour lequel il avait obtenu des financements.» Entre-temps, ils se croisent à nouveau et ont une relation sexuelle, sur laquelle elle cultive des souvenirs ambigus : «Après coup, je ne savais pas trop ce que je faisais là.» D’autres suivront, qu’il initie. Vingt ans plus tard, cette histoire lui semble relever de la zone grise : «Il me semble que j’ai toujours été consentante. Mais avec le recul, cette histoire me semble bien peu égalitaire et assez glauque.»
La deuxième assistante réalisatrice de Ça rend heureux, Valérie Houdart, est l’amie et la colocataire de Vania Leturcq. «Il avait parlé plusieurs fois du fait qu’il nous engagerait de nouveau, chacune au même poste, sur Nue Propriété. Un matin, Valérie m’a avoué que Joachim lui avait proposé le poste de première assistante, en lui demandant de ne rien m’en dire. Je pense qu’il ne m’a pas réengagée parce qu’on a couché ensemble.» Elle se souvient l’avoir croisé de nouveau des années plus tard, lors des Machins du cinéma – une cérémonie satirique qui précède les magrittes. Elle prépare alors son premier long métrage. «Il m’a dit : “En voyant ton court métrage j’ai bandé. Devant ton long, je veux éjaculer.”» Interrogé, Joachim Lafosse réfute avoir prononcé ces propos et affirme n’être pas «coutumier de ce type de vulgarité». Valérie Houdart accuse par ailleurs le réalisateur de faits qui peuvent s’apparenter à une agression sexuelle, pour lesquels elle a envisagé de porter plainte. Selon son récit, ils se sont déroulés la veille du premier jour de tournage de Nue Propriété. Elle avait alors 23 ans. «Nous sommes alors les deux derniers à travailler dans les bureaux. Joachim me plaque dans un coin, entre un mur et une porte et m’embrasse. Mécaniquement, je réponds à cette grosse langue dans ma bouche puis je m’enfuis en courant. Il essaie de m’appeler plusieurs fois. Je ne réponds pas.» Le réalisateur conteste : «Jamais de ma vie je n’ai plaqué qui que ce soit dans un coin entre deux portes pour l’embrasser de force.» Le lendemain, Valérie Houdart raconte être arrivée avec la boule au ventre : «Les trois premiers jours sont catastrophiques, on parle de me virer. Je fais des cauchemars tous les jours mais j’arrive au bout.» Un incident survient le dernier jour du tournage. Selon plusieurs témoins, Joachim Lafosse surgit derrière elle pour actionner une bouteille d’air comprimé dans son oreille – celles qu’on utilise pour nettoyer les caméras. La douleur est telle qu’un médecin vient sur le plateau. «J’ai eu un acouphène pendant deux ans, raconte-t-elle. Il revient encore quand je suis fatiguée ou trop stressée.» Au sujet de ce geste, le réalisateur indique s’être excusé «durant toute l’après-midi et la soirée» : «J’ai fait ce geste stupide et puéril sans aucune intention de faire le moindre mal à Valérie. Seulement partager ma joie de ce clap de fin.»
«Un film sur deux, ça se passait mal»
Malgré tout, et parce qu’elle loue encore aujourd’hui ses relations avec l’équipe du film, «soudée et soutenante», elle accepte de travailler sur le projet suivant, Elève libre. En 2007, le tournage s’apprête à démarrer et Joachim Lafosse est enthousiaste. «J’en ai marre de cette idée reçue du réalisateur démiurge et génial. Un film, c’est une collaboration», déclare-t-il alors dans la Libre Belgique.
Sur le tournage, l’ambiance est plus verticale, pesante. «Il hurlait, humiliait, créait le conflit exprès, L’ambiance était pesante.» Emilie Flamant, 21 ans, scripte, raconte : «Tous les postes clefs ont pleuré sur ce film. Moi aussi, je me réveillais la nuit, je rêvais que j’avais mal au ventre et j’avais en effet si mal au ventre. Je me suis mise à douter de moi.» Un jour, lors d’une séquence aux innombrables prises, voyant que la scène n’avance pas, elle se risque à lui donner un conseil. «Il m’a humiliée devant tout le monde en disant que je ne connaissais pas mon métier.» Des années plus tard, il la contacte pour lui proposer une nouvelle collaboration : c’est elle qui refuse. De son côté, après Elève libre, Valérie Houdart cesse également de collaborer avec lui.
La monteuse Sophie Vercruysse a travaillé avec Joachim Lafosse sur six films, de Folie privée (2004) aux Chevaliers blancs (2015). «Un film sur deux, ça se passait mal», résume-t-elle. Sur le tournage de Ça rend heureux, ils ont une relation sexuelle. «Juste avant le montage, il insiste pour qu’on ait une histoire, il me dit que je dois comprendre qu’il y a quelque chose de particulier entre lui et moi, et je le crois, même si je n’ai aucune envie de coucher avec lui. Après des mois d’insistance, je me dis : pourquoi pas ? Le lendemain, silence radio. Je rencontre une autre de ses collaboratrices, qui me raconte la même histoire que la mienne. Quand je l’appelle, il me répond qu’il a besoin de séduire toutes les femmes avec qui il travaille.» Interrogé sur l’ambiance sexualisée décrite par plusieurs de ses collaboratrices, le cinéaste conteste.
Le travail de montage est poussif, tendu et mal payé, dit-elle. Sur Nue Propriété, le réalisateur est de plus en plus agressif : «Lors d’une soirée où je fais la fête, il vient vers moi, hurle que je dois aller dormir, que demain je travaille et que je suis une pauvre fille, puis il part rageusement en me faisant un doigt d’honneur.»
Sans cesse, Lafosse souffle le chaud et le froid. Un jour, il lui hurle dessus en public, le lendemain, il dépose à son attention de petits cadeaux en salle de montage. Lors du tournage d’Elève libre, les choses dégénèrent définitivement. «Il me met la pression pour que j’aille dormir tôt, me fait des remarques désobligeantes sur mon travail quand il pense que c’est parce que je suis sortie la veille. Une autre de ses phrases fétiches dans le conflit, c’est : “Tu tiens le phallus, hein, t’es fière de le tenir, tu dois le lâcher.”» Elle se sent piégée, ne monte quasiment que ses films, se sent dépendante : «J’ai un peu peur de perdre mon boulot.» Sur le film suivant, A perdre la raison, la collaboration est chaotique. Encore plus sur les Chevaliers blancs : «Il ne vient jamais en montage, explique-t-elle. Par loyauté, je ne préviens pas la production de son absence. A un moment donné, un des comédiens fait une crise en disant que le film est mal monté. Joachim me fait porter le chapeau.» Pour se justifier, il lui ferait alors part de sa «théorie du fusible» : «Quand il a trop de pression, il fait sauter une personne entre lui et la pression. Cette fois, c’est moi. Après six films, je fais mes bagages.» Le réalisateur dément toute «théorie du fusible» : «Il est impossible de me reconnaître dans ces mots.»
Sur le tournage de l’Economie du couple, plusieurs de ses collaboratrices se souviennent de tensions, avec notamment «un nombre énorme» de prises pour une séquence où deux petites filles sont plongées dans un bain. L’une d’elles décrit : «Joachim Lafosse cherche à créer des conflits, tu te vois te trahir moralement et faire des choses que tu ne veux pas faire, pour quelqu’un que tu ne respectes pas.» Le premier assistant réalisateur est remplacé par Hélène Karenzo. Dès son arrivée, elle voit le cinéaste «péter des câbles, alors qu’il avait une équipe parfaite autour de lui.»
Sur le tournage de Continuer, Virginie Efira raconte avoir «pris une distance très forte avec lui», au point de ne plus lui parler : «Il essayait de me parler, je courais en disant, je ne peux pas te voir, je ne peux plus te voir ! C’était un des tournages les plus drôles dans le pathétisme. J’avais 40 ans, il ne pouvait absolument pas me virer, je suis une actrice déjà placée. Il m’a poussée à bout, mais tout le monde était contre lui, les producteurs n’en pouvaient plus. Il était en totale minorité. Il était, en fait, seul.» De son côté, Joachim Lafosse indique que sa relation avec Virginie Efira sur le tournage était «cordiale et respectueuse».
Questions sur la vie privée
A ce stade du récit, une question : qui garantit de bonnes conditions de travail et assure la santé et la sécurité des employés sur les tournages, et comment ? Si des obligations pèsent sur les producteurs, employeurs légaux des personnes recrutées pour un film, il ne faut pas négliger le rôle du réalisateur. «Sur un plateau, il est le supérieur hiérarchique, le n + 1 de l’équipe, il fait le relais entre elle et la production», résume Ghislain Gauthier, secrétaire général de la CGT spectacle. Seulement, l’économie du cinéma, son fonctionnement avec des missions courtes, induisant une précarité des contrats, fragilise ces salariés plus vulnérables. «La loi du silence domine. Les victimes ne s’expriment pas de peur d’être virées et blacklistées, poursuit-il. On se heurtera toujours à ces contrats pas protégés, et un secteur au début de la conscientisation de la santé au travail et la prévention.» Selon lui, des outils restent à inventer : «Une personne qui fait un signalement à la production devrait être protégée. On voudrait des droits à la représentation du personnel pour les intermittents sur les tournages, c’est-à-dire un délégué élu et salarié protégé, qui pourrait porter la voix de ses collègues auprès de la production.»
Jacques-Henri Bronckart, à la tête de la maison de production Versus, a accompagné les films de Joachim Lafosse pendant des années, d’Elève libre à Continuer. La manière de travailler du réalisateur, c’est «clairement la raison pour laquelle j’ai décidé de ne plus collaborer avec lui», dit-il. Il décrit lui aussi des tournages avec «pas trop de limites», un réalisateur qui a besoin de «foutre le bordel», avec qui il a eu de nombreuses altercations lors des tournages, «fait peser sur ses collaborateurs la réussite de ses séquences», a fait l’objet de nombreux recadrages, et qui «répète ad libitum ses erreurs». «Il y a des endroits où il a plus de prise que d’autres», ajoute Jacques-Henri Bronckart, évoquant les multiples scénaristes de ses deux derniers films. Il est en effet d’autant plus facile d’imposer sa loi dans un huis clos dédié à l’écriture d’un scénario ou en salle de montage, loin des regards.
Quand Joachim Lafosse a proposé à Juliette Goudot d’écrire un film à quatre mains, elle a d’abord ressenti «beaucoup de joie». En 2018, elle a 40 ans et un travail de journaliste et de critique de cinéma. Pendant quelques semaines, le travail avance, ponctué des considérations du cinéaste sur la psychanalyse : «Le travail du scénariste, c’est de sublimer la libido.» Un jour, il lui fait une «déclaration d’amour», pas réciproque. La relation se dégrade, il juge désormais ses idées «indignes d’une scénariste». Après trois mois, Juliette Goudot se met en retrait du projet. Huit scénaristes en tout seront finalement crédités pour les Intranquilles. De son côté, le réalisateur conteste toute dégradation des relations professionnelles après une déclaration d’amour ou des avances explicites faites auprès de certaines des «4 collaboratrices», calcule-t-il, pour qui il a développé «des sentiments autres que professionnels».
Après le départ de Juliette Goudot et d’une autre autrice, qui n’a pas souhaité s’exprimer publiquement, mais indique soutenir la parole des témoins, deux scénaristes débutantes sont recrutées comme stagiaires sur les Intranquilles. En 2019, Lou du Pontavice termine sa cinquième année d’études. L’auteur s’enferme dans son bureau, les jeunes femmes écrivent, avant de lui lire le résultat à voix haute. Au déjeuner, il pose «trop souvent» des questions sur leur vie privée, les compare l’une à l’autre, de «manière insidieuse». Au bout d’une semaine, Lou du Pontavice pense arrêter la collaboration qu’elle «pressent nocive», mais son amie et collègue la convainc de rester.
«Tout le monde rentre chez soi, bravo !»
Au bout d’un mois de stage non rémunéré, Joachim Lafosse leur propose de passer co-scénaristes. Le travail avance, ponctué de scènes étranges. Après la réponse positive d’une commission, il est question d’organiser une fête. «Il dit qu’il n’invitera pas nos mecs.» Les jours suivants, Joachim Lafosse les questionne sur leurs relations, leurs compagnons… «Ce à quoi ni moi ni elle ne répondons.» A la rentrée, sa co-stagiaire doit quitter le projet. Lou du Pontavice se retrouve seule avec lui.
«Je me souviens de la peur le matin en allant le retrouver, dit-elle. Je ne sais jamais sur quel pied danser, ni dans quelle humeur je vais le retrouver.» Il la reprend sur chaque mot, lui explique son travail «comme à une idiote», la «rabaisse continuellement». «Sous pression, le comportement de Joachim est sans limite et ouvertement sexiste.» Un point final est mis à une nouvelle version du scénario. La jeune femme se risque à lui dire qu’il est parfois «difficile» de travailler avec lui, qu’il est «agressif». Le réalisateur se met à «hurler», la traite d’«hystérique», de «molle». Quelques jours plus tard, elle annonce quitter le projet. «Il me répond qu’ils se passeront très bien de moi.» Joachim Lafosse conteste avoir traité quiconque de «molle» ou d’«hystérique».
En fin d’année, elle appelle le producteur du film, Anton Iffland Stettner de Stenola Productions, pour lui décrire ce qui s’est passé. «Il me demande s’il y a eu du harcèlement sexuel, je lui réponds que non, il a l’air soulagé.» Quelques jours plus tard, elle envoie un mail où elle indique que Joachim Lafosse a été «odieux et dégradant», ajoutant : «Les limites ont été largement dépassées.» Contactés, les producteurs n’ont pas donné suite à notre demande d’entretien.
Vient le tournage d’Un silence, sorti en 2024. Parmi les comédiennes recrutées, Lisa Debauche. Pour des raisons complexes, la jeune femme a une histoire familiale qui la lie à celle du cinéaste. Elle se pose des questions sur son histoire personnelle et sur son père décédé quand elle était encore enfant. Lorsqu’il lui propose un rôle dans son nouveau film, Un silence, inspiré de l’histoire d’un avocat belge médiatique condamné pour détention d’images pédopornographiques, elle accepte. Thème du film : le déni dans le cadre des violences intrafamiliales.
Après une séance d’essais pour les costumes, elle se retrouve seule en voiture avec Joachim Lafosse, qui revient sur leur histoire commune. «En mentionnant que mon père était l’ennemi de sa famille, précise-t-elle, ça me plaçait à un endroit où j’étais la fille de l’ennemie.» Elle lui dit être déstabilisée à l’idée de parler de cette histoire. «Il me répond : “Attention Lisa, tu ne vas pas toi aussi faire du déni.”» Les scènes sont tournées quarante, cinquante fois. «Je me sens vidée, épuisée, dénigrée.» Lors d’une prise, elle craque. Quelques jours plus tard, le cinéaste la rappelle : erreur de casting, fin de l’aventure. «Quand on se recroise à Bruxelles, il me dit que je ne suis pas la seule responsable de cette histoire.» En face, Joachim Lafosse incrimine «le contexte particulier», «les obligations de production», «les délais très courts», «le stress du tournage» qui ont été «des facteurs certainement destabilisants». L’actrice Louise Chevillotte la remplace.
Séquelles
Lors de son premier jour de tournage, cette dernière assiste à des «cris», des «propos tranchants et humiliants», une «incapacité à expliquer ce qu’il cherche à son équipe». «Au bout d’une quarantaine de prises, je souffle à ma partenaire que je n’en peux plus.» Son micro HF n’est pas coupé, le réalisateur l’entend. «Il sort de la salle où il regarde le combo, il applaudit pour féliciter “mademoiselle Chevillotte qui veut arrêter de travailler, alors je vais arrêter le cinéma, bravo, félicitations, il reste trois quarts d’heure mais tout le monde rentre chez soi, bravo !”» Le tournage est tendu, la nervosité se répercute sur toute la chaîne. Une machiniste n’a pas le temps de sécuriser un système d’éclairage : après une bourrasque, près de soixante kilos de matériel s’effondrent sur elle, l’envoyant aux urgences. Elle reprend le travail trois jours plus tard. «Elle a eu de la chance», confie un témoin de la scène. De son côté, le directeur de production Vincent Canart pointe les «contraintes budgétaires» imposées sur les deux derniers films du réalisateur, «la tension qui règne sur un plateau de tournage» et assure ne pas avoir été alerté de «problèmes graves» relatifs au comportement de Joachim Lafosse. «Il ne s’agit pas de défendre qui que ce soit, il y a un tas d’attitudes qui ne sont pas excusables. Mais il traîne une réputation qui, si elle n’est pas totalement injustifiée, me paraît largement exagérée.» Après le tournage, Louise Chevillotte alerte les producteurs belges du film, Stenola Productions. «Ils m’ont envoyé paître en me demandant si j’étais pour une uniformisation des réalisateurs.» En décembre 2023, un mois avant la sortie du film en salles, elle prévient la production française. Interrogé sur cette collaboration, il indique : «Je suis absolument désolé d’avoir fait traverser de telles difficultés à Louise. Je tiens à lui présenter à nouveau mes excuses et à lui exprimer mon désarroi.»
La sortie d’Un silence est un détonateur pour la majorité d’entre elles. Nous sommes début 2024, en plein #MeToo cinéma. Joachim Lafosse publie un long message sur les réseaux sociaux : «Et j’entends, et j’entends et j’observe et je pense à mon film Elève libre, à ce risque du lien pervers. A cette possibilité de l’emprise. […] Il semble donc qu’on découvre la libido débordante du pouvoir ! […] Il est dans notre profession, tout à coup, question du pouvoir, de sa possible jouissance, de son possible refus des limites. […] Il faut être costaud pour ne pas céder à la dévalorisation, à l’abrutissement, il faut lutter pour être autre chose qu’un objet. Il faut être costaud pour résister à la voracité de l’industrie du cinéma, il faut être très très costaud.» Le message circule entre anciennes collaboratrices du réalisateur, dont Valérie Houdart qui en la «nausée». Insoutenable paradoxe entre les vertus affichées et les souffrances vécues.
La réponse des producteurs à Louise Chevillotte arrive le 30 janvier 2024, par mail : «Croyez bien que nous sommes très soucieux de la nécessité de garantir et de maintenir une atmosphère et des conditions de travail respectueuses de chacun sur un plateau. […] Nous avons d’ores et déjà entamé, en concertation avec Joachim, une profonde réflexion qui sera suivie.» Le 2 avril 2024, nouveau mail : «Nous avons pris ensemble les mesures et précautions nécessaires, assuré une présence, protection et écoute en conformité fidèle avec la charte (référents acteurs et techniciens) afin d’assurer un tournage serein pour toutes et tous.»
Des années après les faits, les femmes qui témoignent évoquent les séquelles qu’a laissées leur collaboration avec Joachim Lafosse. Un temps, Emilie Flamant a pensé arrêter le métier de scripte pour vendre des bandes dessinées. Elle l’est finalement toujours, pour la RTBF. Vania Leturcq, elle, a le sentiment que son corps lui parle dès qu’elle est dans une situation de stress au travail. Sophie Vercruysse se décrit comme «en hypervigilance».
Actuellement, le réalisateur est en tournage dans le sud de la France. «Sur le film que je suis en train de tourner, nous écrit-il, j’observe l’apaisement qu’apporte aujourd’hui ces préoccupations de santé, de bien-être, de sécurité, dans la volonté collective de veiller à ce que des tiers questionnent la manière dont nous fabriquons des films». Eye Haïdara y joue le rôle principal. Elle remplace l’actrice Guslagie Malanda, laquelle indique, par la voix de son avocate, se trouver «à l’heure actuelle dans l’impossibilité de parler». Elle indique «soutenir les victimes». Le réalisateur, lui, dit prendre part «activement dans la pratique de mon métier aux évolutions magnifiques et fondamentales en ce qui concerne les violences sexistes et le bien-être au travail dans le cinéma».
La psychothérapie en général, et la psychanalyse en particulier, aura plus tendance à donner l'occasion à ce genre de types de rationaliser leur comportement, assimilier des concepts et devenir encore plus fourbes. Et un psychiatre, à part lui filer une ordonnance pour calmer ses angoisses, n'y pourra pas grand chose non plus. Irrécupérable. Faut juste le tabasser.
Je fais référence à ces deux phrases :" “Tu tiens le phallus, hein, t’es fière de le tenir, tu dois le lâcher.”»" ; Quand Joachim Lafosse a proposé à Juliette Goudot d’écrire un film à quatre mains, elle a d’abord ressenti «beaucoup de joie». En 2018, elle a 40 ans et un travail de journaliste et de critique de cinéma. Pendant quelques semaines, le travail avance, ponctué des considérations du cinéaste sur la psychanalyse : «Le travail du scénariste, c’est de sublimer la libido.»
Pas sûr qu'être barbouillé de psychanalyse ait été positif pour lui.
Inscription: 04 Juil 2005, 15:21 Messages: 22905 Localisation: Paris
C’est qui, le gars en question ?
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Inscription: 04 Juil 2005, 15:21 Messages: 22905 Localisation: Paris
Ah putain…
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Inscription: 04 Juil 2005, 15:21 Messages: 22905 Localisation: Paris
Je l'ai déjà dit ici : mec hyper gentil, poli, discret, en live il y a quinze ou vingt ans, déjà très pompeux dans ses textes, et insupportablement con sur Twitter. Pourquoi ?
EDIT : sinon, je lis pas mal de twits demandant aux Cahiers de virer Malausa... Mais concrètement, que peuvent-ils faire ?
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Je trouve les appels à son renvoi des Cahiers plus dérangeant et dégueulasse que l'ensemble de ses tweets (sauf s'il a effectivement mis en ligne du revenge porn)
Inscription: 25 Nov 2005, 00:46 Messages: 86816 Localisation: Fortress of Précarité
Bah...il a mis en ligne du revenge porn (avant de supprimer son message suite au tollé mais y avait déjà plusieurs dizaines de milliers de vues sur le tweet). Et c'est un délit (ou crime, j'y connais rien), en tout cas c'est interdit et puni par la loi. Donc les Cahiers pourraient le virer même si les QGJ de ce monde viendront s'indigner qu'un cishet blanc soit condamné de la sorte et nous sortira encore "eT aPrÈs On DiT qUe La CaNcEl CuLtUrE eXiStE pAs".
Inscription: 04 Juil 2005, 15:21 Messages: 22905 Localisation: Paris
Mais son message… Il contenait quoi ?
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