Non, ce n'est pas une nouvelle série, mais un copié-collé d'un article marrant choppé sur le site d'@si :
Le Figaro raconte la merveilleuse histoire d'un petit Français, devenu scénariste de la série à succès Docteur House (TF1). Problème : aucune preuve n'atteste de la réalité de cette collaboration.
Le milieu médical semble être une source d'inspiration intarissable pour les séries américaines. Mais Docteur House est un cas à part. C'est le cas de le dire, puisque ce médecin hors normes déteste les patients, mais est spécialisé dans les diagnostics difficiles et autres maladies rares. Accro à la vicodine, cynique et cinglant, le médecin qui fait un carton aux Etats-Unis est regardé en France par près de 8 millions de personnes chaque semaine sur TF1, et flirte avec les 30% de parts de marché.
Autant dire que les articles sur la série sont très prisés... D'autant plus, s'ils nous annoncent qu'un Français se trouve à l'origine de la série. Samedi 7 juin en effet, Le Figaro consacrait une demi-page de sa rubrique culture à une vraie success story. C'est l'histoire du Français Hervé Nicolas, qui, nous dit-on, « a inspiré à Bryan Singer la série américaine Docteur House ». Surnommé "flash writer" par Bryan Singer, le producteur de la série, il écrirait aujourd'hui pour d'autres séries, Heroes et Grey's Anatomy.
Plus étonnant encore, la façon dont il est arrivé dans le métier en 1995 : atteint d'une maladie orpheline, il s'est rendu aux Etats-Unis pour consulter un spécialiste. Là, il rencontre le célèbre Bryan Singer, réalisateur entre autres de Usual Suspects. Celui-ci fait justement des recherches sur les cas médicaux hors-norme, raconte Le Figaro. Hervé Nicolas passe alors un test d'écriture, et il réussit haut-la-main à écrire dix pages de dialogue en quinze minutes. « Huit ans passent sans nouvelles jusqu'à un coup de téléphone en 2003 ». Là, Bryan Singer lui propose de « rejoindre l'équipe de la série à Los Angeles ». De fil en aiguille, le voici scénariste pour plusieurs séries, Grey's anatomy et Heroes, deux énormes succès outre-atlantique et en France.
Seulement, cette success story sonne quand même faux. C'est un internaute qui a attiré l'attention d'@si sur le sujet.
Le fan de séries qui cherchera des renseignements sur ce scénariste restera sur sa faim. Rien sur IMDb, le site qui répertorie tous les personnels du cinéma et des séries. Rien non plus sur le site de la ligue des scénaristes. En revanche, on trouve sur lui un article de Ouest France, sur un sujet annexe : Hervé Nicolas a bien publié un roman, intitulé L'affaire Elfe, aux éditions du Léopard masqué. Une parodie médiévale fantastique de la vraie affaire elf. Sa page Wikipedia mentionne l'écriture de trois épisodes de la série Docteur House, mais cela ne signifie évidemment rien..
Bref, qui est donc ce mystérieux scénariste de génie dont personne n'a entendu parler? Joint par téléphone, son éditeur ne peut confirmer cette partie de sa carrière. Plusieurs journalistes l'ont déjà appelé suite à l'article. Des connaissances professionnelles de Nicolas avouent douter de cette version des choses, sans pour autant l'infirmer directement.
Contacté par @si, Hervé Nicolas assure être « freelance », ce qui expliquerait selon lui qu'il ne soit pas crédité dans les génériques de la série. Il travaille de France et, au sein de l'équipe, serait en contact avec Bryan Singer, et lui seul. A NBC Universal, studio producteur, on indique que la série a été créée par David Shore et Paul Attanasio, Bryan Singer n'ayant été appelé que plus tard pour réaliser le pilote. Mais interrogé plus précisément, Hervé Nicolas peine à s'expliquer. Comment a-t-il les contacts? Confus, il explique n'être en liaison qu'avec Bryan Singer, qui lui-même l'aurait mis en contact sur les autres séries. « Je comprends vos doutes, mais ça va être difficile à recouper », dit-il simplement.
L'article du Figaro le vend non seulement comme scénariste de Docteur House, mais aussi de Grey's anatomy et de Heroes. « J'ai participé à l'épisode pilote de House », précise-t-il. Puis plus rien, avant de participer à quatre épisodes, mais pour la saison cinq, « pas encore diffusée », explique-t-il laborieusement. Sur Grey's anatomy, il s'agirait d'un épisode, peut-être dans la saison trois. Heroes? « J'ai inventé le personnage de Hiro Nakamura (un Japonais qui courbe l'espace-temps avec son esprit, ndlr) , mais le synopsis m'a été refusé ». Pourtant, le personnage existe vraiment. Et l'écrivain ne semble pas se plaindre d'un quelconque vol d'idée.
Idem concernant l'argent que lui rapportent ces collaborations. « C'est pas moi qui gère l'argent, c'est mon épouse. » Plus tard, il dira : « Sur le contrat, ça doit être 15 000 euros grosso modo pour un épisode. » Or, nous assure la spécialiste du secteur Claire Dixsaut, ex-rédactrice en chef de la Gazette des scénaristes, pour pouvoir être payé en tant que scénariste aux Etats-Unis, « il faut être syndiqué ou faire partie d'une guilde, sinon c'est illégal. » Par ailleurs, généralement, les personnes qui travaillent pour les Etats-Unis en France se connaissent. « Normalement, il faut avoir un agent qui négocie les arrangements commerciaux, et tous les auteurs, même s'ils ne participent qu'au brainstorming, sont forcément crédités », assure-t-elle. Après avoir proposé d'envoyer une copie de contrat, il n'a finalement pas donné suite.
Quant à la rencontre d'Hervé Nicolas avec Bryan Singer dans cet hôpital d'Atlanta que nous conte si joliment Le Figaro, elle n'a pas eu lieu ainsi, rectifie l'écrivain à @si. « Je n'étais pas physiquement dans cet hôpital. C'est mon cas qui a été étudié et Bryan Singer m'a contacté ensuite. Le journaliste sait comment j'ai rencontré Bryan Singer, mais je n'ai pas envie de le raconter parce que ça touche sa vie privée. C'est le seul truc vraiment brodé. Je ne l'ai pas rencontré à ce moment-là aux Etats-Unis. J'ai dit à Olivier (le journaliste, ndlr) que ça allait être compliqué, de dire comment je l'ai rencontré, alors on a décidé d'écrire ça. » Ce que confirme le journaliste Olivier Delcroix. « On s'est mis d'accord sur une version officielle », pour éviter, donc, de dévoiler la vie privée de Bryan Singer... Car le journaliste du Figaro ne doute pas une seconde que cette histoire soit vraie. Il admet cependant avoir un peu « survendu » l'affaire en le présentant comme celui qui a inspiré la série.
C'est triste.
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