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Bodied (Joseph Kahn, 2017)
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Auteur:  Puck [ 08 Aoû 2018, 22:43 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Jerónimo a écrit:
(parce que le film n'est sans doute pas offensant pour tout le monde).


Sisi, c'est justement le propos du film. Et c'est pour ça qu'il est aussi bon!

Auteur:  Jerónimo [ 08 Aoû 2018, 22:53 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Puck a écrit:
Jerónimo a écrit:
(parce que le film n'est sans doute pas offensant pour tout le monde).


Sisi, c'est justement le propos du film. Et c'est pour ça qu'il est aussi bon!


J'ai pas vu le film...

Mais disons qu'offensif dans le sens d'un film qui attaque (son sujet, la bienséance, les spectateurs), qui agresse, qui a l'esprit combatif, je comprends l'idée (même si c'est peu tiré par les cheveux et que ce n'est pas strictement l'opposé d'inoffensif).

Auteur:  Art Core [ 29 Nov 2018, 13:11 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Je l'ai lancé chaud comme la braise, content de pouvoir enfin le découvrir, moi qui avait beaucoup aimé Detention et qui aime bien la personnalité de Kahn sur Twitter et... j'ai quasiment détesté.

Dès les premières minutes en fait j'ai eu du mal avec le dispositif du film. Une battle de rap et au milieu un nerd blanc avec sa tête de cul qui vient faire l'explication de texte. Mais bon, je me suis dit que le film allait jouer intelligemment avec ça et que le blanc bec va pas être le héros d'un film sur le hip hop et les rap battle. Mais en fait si. Et c'est pas parce qu'il est constamment self conscious que ça parvient à lui faire éviter d'être un film de blanc sur une culture majoritairement noire ou du moins, "non blanche". Donc déjà j'ai beaucoup de mal avec ce postulat et avec cet angle d'attaque. Encore une fois l'impression d'un film de blanc, qui utilise un personnage "introductif" pour que les novices puissent s'y identifier et lire les codes d'une sous-culture particulière. Et ça me dérange profondément dans le concept même du film qui dès lors avait perdu le combat pour moi.

Surtout que c'est pas l'artificialité absolue de l'intrigue improbable qui va apporter un peu d'authenticité à un film totalement toc. Que le blanc bec, sosie de Ron Weasley (c'est dit d'ailleurs dans une punchline), devienne une légende de rap battle en deux deux, pourquoi pas ? Mais que son crew soit un mix ridiculement inclusif avec un hispanique, un asiat, un black et une meuf c'est juste ridicule (il manque juste un(e) gay). Encore une fois le film est très "self conscious" et une punchline vient dire exactement ce qu'on pense "United colors of Benetton". Mais c'est tout fabriqué, on n'y croit pas une seule seconde. Alors le film a beau avoir beaucoup d'ironie sur lui-même, être sans cesse dans sa propre analyse ça n'enlève pas moins que tout sent l'artifice et que Bodied n'est pas du tout un film sincère et authentique sur la sous-culture des battle de rap. Au contraire même il en représente une version aseptisée et presque insultante en ce qu'il la vide de toute sa dimension sociale et ethnique.

Mais au delà de ça déjà le film (surtout dans sa première partie) aurait pu s'appeler Twitter, the movie tant j'ai eu l'impression d'être devant une TL Twitter remplie de SJW teubées et de débats ridicules sur le racisme, l'appropriation culturelle etc... Au delà de ne pas avoir trouvé ça drôle mais au contraire très lourd dans la caricature (la meuf du héros est littéralement insupportable, tu as envie de l'assassiner dès la deuxième minute), j'ai trouvé cette écriture très dense, très rapide (on dirait du Sorkin 2.0) totalement stérile car tout bonnement incapable de sortir de sa posture ironique pour réfléchir quoi que ce soit. On est vraiment dans une cacophonie twitteresque où chacun y va de son petit statement et où Kahn regarde tout ça avec une distance ironique qui rend absolument stérile toute forme de réflexion. A part deux trois trucs bien vus (comme justement le débat récent sur le N word), je suis incapable de dire où se situe Kahn parce que si les hipsters ridicules sont insupportables (fallait-il être aussi caricatural ?) et qu'ils ne disent que de la merde du coup qu'est-ce qui reste ?

Le film est idéologiquement bordélique mais surtout totalement stérile, incapable de penser ses propres concepts, se contentant de balancer des vannes ironiques sans recul et sans sincérité. Ce n'est pas parce qu'on vocalise la problématique dans les dialogues que ça rend le film intelligent. Au contraire, j'ai l'impression que cette "auto-conscience" finit par jouer contre lui. Car oui les battle de rap sont racistes, misogynes, homophobes etc... Et donc ? C'est bien ? C'est pas bien ? C'est juste de l'humour ? On dit que c'est "an act". Donc ça justifie tout ? Et du coup quand on parle poésie au début, Kahn en pense quoi, est-ce de la poésie ? Le personnage principal qui finit presque comme un super vilain ne sera pas rendu soudain sombre et positivement méchant parce qu'il dit des trucs racistes ou homophobes mais parce qu'il débite des horreurs sur la vie privée de son pote et la maladie de sa fille (encore une pirouette de scénario bien fabriquée). Et surtout qu'au final le mec se transforme littéralement (génial dernier plan avec la chanson derrière)
en Eminem (difficile de pas y voir d'ailleurs la mégalomanie du prod derrière cette pirouette).


En parlant de misogynie, j'ai trouvé le film totalement misogyne. La femme y est le cliché de la vagina dentata, entre l'insupportable blonde SJW et la femme de Benh Grym (on peut aussi rajouter la dean de la fac, cliché de la femme noire éduquée qui a écrit des bouquins sur le féminisme noir - encore un moment ironique que j'ai trouvé mal placé d'ailleurs). Devine est à peine esquissée, c'est un personnage secondaire sans relief. Et la scène avec l'actrice porno est tout bonnement scandaleuse. La meuf est juste un trou, une excuse scénaristique pour justifier le beef entre Che et Mega machin. La scène où ils sont interrompus en train de baiser, elle est totalement ignorée, elle a pas une ligne de dialogue. Ça m'a pas mal gêné et le film ne se relève pas vraiment de ça.

Après le film est très efficace, très rythmé, les battle sont funs, les punchlines font mal. J'ai pas mal pensé à Scott Pilgrim qui a un truc un peu similaire mais qui s'amuse beaucoup plus. Et finalement plus j'y pense et plus le sentiment désagréable qu'il m'a laissé en bouche prend le pas sur tout le reste.

1-2/6

Auteur:  Billy Budd [ 29 Nov 2018, 14:19 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Ne revois pas Detention.

Auteur:  Le Cow-boy [ 29 Nov 2018, 14:25 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

lol

Auteur:  Film Freak [ 30 Nov 2018, 22:54 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Art Core a écrit:
Dès les premières minutes en fait j'ai eu du mal avec le dispositif du film. Une battle de rap et au milieu un nerd blanc avec sa tête de cul qui vient faire l'explication de texte. Mais bon, je me suis dit que le film allait jouer intelligemment avec ça et que le blanc bec va pas être le héros d'un film sur le hip hop et les rap battle. Mais en fait si. Et c'est pas parce qu'il est constamment self conscious que ça parvient à lui faire éviter d'être un film de blanc sur une culture majoritairement noire ou du moins, "non blanche". Donc déjà j'ai beaucoup de mal avec ce postulat et avec cet angle d'attaque. Encore une fois l'impression d'un film de blanc, qui utilise un personnage "introductif" pour que les novices puissent s'y identifier et lire les codes d'une sous-culture particulière. Et ça me dérange profondément dans le concept même du film qui dès lors avait perdu le combat pour moi.

Mais pourtant c'est précisément le propos. Le film n'est pas juste self-conscious, il en fait son sujet. Kahn l'explique bien en interview, il dit qu'8 mile se demandait "can a white guy rap?" tandis que Bodied demande "should a white a guy rap?".

Eminem/son perso dans 8 mile trouvait sa légitimité dans ses origines, son éducation, son milieu social de white trash des environs de Detroit.
Adam c'est un gosse de riche, le fils du doyen de la fac, qui veut juste pouvoir "faire comme les rappeurs". Alors il le fait bien mais en a-t-il le droit? Si on schématise, c'est toute la question posée par le film. Et Kahn n'essaie pas d'imposer un point de vue radical manichéen, il fait un film bien plus ambivalent mais ce n'est pas un hasard si Adam trouve enfin son nom/son identité/sa légitimité une fois qu'il a tout perdu.

Auteur:  Art Core [ 01 Déc 2018, 09:54 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Premièrement je trouve que s'attaquer à cette sous culture là par ce biais est d'emblée une erreur, parce qu'au fond on s'en fout de ce blanc et que les personnes qui font vivre ces battle auraient du être les héros du film et deuxièmement l'ambivalence dont tu parles me semble plutôt une espèce d'impasse où Kahn ne dit plus rien parce qu'il ne sait plus quoi dire. Ce qui me dérange c'est que l'image renvoyée par le film sur le monde des battle (que moi je ne connais pas personnellement) est finalement négative, peuplée de mecs qui ont du talent dans l'insulte raciste, homophobe et misogyne mais rien d'autre. Encore une fois cette manière de vider son sujet de toute considération politique et sociale est un peu désolante.

Auteur:  bmntmp [ 28 Jan 2019, 12:32 ]
Sujet du message:  Re: Bodied (Joseph Kahn, 2017)

Préféré Step Sisters qui traite du même sujet (l'appropriation culturelle) mais qui prend le point de vue du mentor noir et non du jeune protégé (un groupe de jeunes filles en fait dans Step Sisters), pareillement saturé de références culturelles dans les dialogues qui les rendent limite incompréhensibles par moment.
Ce qui bloque dans Bodied, qui reste un film intéressant dans la manière dont il met en plein le pied dans la fourmilière du politiquement correct, c'est que les battle de rap ne sont pas une discipline franchement intéressante (débiter des insultes à la recherche de la punchline la plus gratuite, je me désintéresse rapidement), et même s'ils sont un peu plus palatable ici que dans la réalité car mis en scène, mieux scriptés, mieux joués.
Le film ne pose pas la question de savoir si un blanc doit faire des battle, ce qui ne semble poser problème à personne, et consiste à formuler le problème de manière hypocrite, mais de savoir si un blanc a le droit d'être meilleur que les autres dans une discipline qui culturellement n'est pas la sienne. C'est un peu le problème qui se retrouvait in fine au centre du susmentionné Step Sisters.
Presque un faux débat dont on comprend combien il peut être douloureux mais qui est le signe d'une certaine régression à mon avis à l'époque actuelle.

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