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Paterson (Jim Jarmusch, 2016)
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Auteur:  Baptiste [ 23 Jan 2017, 18:39 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Perso, je comprends qu'on aime pas mais je trouve que le sens de l'anecdotique des poèmes lus a une certaine beauté, sans parler du côté métaphorique, du rythme, de l'effet donné par la voix de Driver, le montage et la réalisation...

Auteur:  Lohmann [ 24 Jan 2017, 18:56 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Lohmann a écrit:
Le personnage de Farahani n'est absolument pas une femme au foyer, c'est une artiste qui n'a pas percée. Je serais très curieux d'avoir un avis féminin sur la question.


Alabama a écrit:
Je n'y ai pas lu la même chose que ce que j'ai pu voir dans les messages précédents me semble-t-il.
Sur le personnage de sa femme, je la vois plus comme une artiste en manque et zappeuse qui est à la maison car lui fait un boulot planplan pour assurer le quotidien du ménage et qu'elle puisse s'exprimer sans que ce soit gênant que ça ne soit pas rémunérateur. Il lui laisse la chance de s'accomplir, de suivre ses voies sans croire à fond que ça puisse marcher un jour.


CQFD

Auteur:  Slacker [ 17 Fév 2017, 13:39 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Banalize this

Quel drôle de truc, un film de Jarmusch.

Ca a l'air de rien, parfois ça pète plus haut que son cul ou ça parle à deux personnes, mais ça campe quand même une atmosphère avec rien et comme personne, à part Linklater peut-être.
Dans ce film c'est presque le sujet central: comment un quotidien aussi routinier, aussi banal, peut receler autant de grâce (la chute d'eau, les rencontres, les conversations de bus / de bar), ou en tout cas autant d'intentions artistiques de la part des personnages eux-mêmes. Cet art naïf auquel ils s'adonnent tous les deux, sans trop savoir ce qu'il vaut, mais qui illumine leur banalité, a ceci de beau qu'il est sans prétention, destiné plus à l'épanouissement personnel qu'à l'éblouissement des foules. Sur ce point cependant Laura a plus d'ambition(s), plus qu'elle se voit à la fois pâtissière, folk-star, dessinatrice de mode, peintre, etc... Ce côté inconséquent, interprété par certains comme du sexisme de la part de JJ, je le trouve plutôt attachant, car si ses toiles sont hideuses, certains de ses délires vestimentaires sont réussis, et son enthousiasme est frais et entraînant. Le running-gag du noir et blanc m'a fait sourire, pas seulement pour me foutre de la gueule de la fille, mais comme on sourit en reconnaissant un trait de caractère un peu caricatural chez un ami (et en passant, son utilisation du noir est toujours gaie, ce qui constitue un tour de force (à prononcer avec l'accent du NJ). Cette façon de caractériser Laura, comparée à Delerm et à Amélie Poulain par certains, je la trouve quand même plus réussie, chez Jarmusch. Et on comprend qu'Adam "Bus" Driver puisse être amoureux, en plus de sa beauté, de ses petites lubies, même s'il les subit aussi (le chien, la thune de la gratte, la tourte aux chous de bruxelles).

Nom de pays : le nom

Le fait de nommer le héros comme la ville n'a probablement rien de gratuit: on parle de Paterson New Jersey à travers un type lambda, et inversement. Les murs de brique d'un passé industriel, les bars, les glorieux anciens, poètes ou non, les conversations des voyageurs, ont fait du chauffeur de bus ce qu'il est aujourd'hui.
Image
(MongrelMedia)
Sinon, Pater en latin, son en anglais, ça vous évoque rien? Effectivement il fait partie de ses types qui refusent l'obstacle (un temps) avant de se reproduire, il voit des jumeaux partout depuis que sa femme lui a parlé d'en faire,
le genre de mec qui laisse traîner son carnet près du chien jaloux avant de sortir avec madame, JUSTEMENT LE WEEKEND OU IL A PROMIS DE FAIRE CES PUTAINS DE PHOTOCOPIES - Autrement dit, je suis d'accord là-dessus avec Alabama, que j'aime en secret et en hide
. C'est finalement un personnage assez courant, adulescent attardé typique ayant peur de s'engager. Dans une certaine mesure,
le cadeau final du carnet est aussi une incitation à créer la vie, un enfant-page blanche, terrifiant et exaltant à la fois
.

De la qualité artistique, et de comment je m'en branle

Jarmusch prétend que ses idées de film lui sont souvent inspirées par une musique, qu'il utilise ensuite bien sûr. Habituellement il a bon goût; j'ai trouvé celle-ci parfaitement anecdotique et très oubliable, peut-être a-t-il choisi exprès quelque chose de simple et naïf pour filer la métaphore, mais bof.
Pour ce qui est de la qualité des poèmes, j'ai apprécié certains d'entre eux, leur petite musique, sans trouver ça fou, mais je trouve inutile de s'entre-déchirer à ce propos: qu'ils soient bons ou mauvais, le film fonctionne quand même, et les lubies artistiques du couple restent attachantes, et remplissent leur vie qui peut par ailleurs sembler bien fade. A ce titre, la surdramatisation de l'épisode de la panne vient souligner à quel point il ne se passe rien de notable dans cette vie, et fout un peu le cafard quand même.

Auteur:  Baptiste [ 17 Fév 2017, 18:55 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Très bonne critique!

Auteur:  Slacker [ 19 Fév 2017, 18:07 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Merci, ça me fait plaisir, venant d'un expert!
A l'année prochaine :)

Auteur:  Erik Vonk [ 06 Mar 2017, 19:37 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Enfin rattrapé

Pour moi, c'est un film parfait. L'un des meilleurs de Jarmush. C'est doux, mesuré, rien ne dépasse. Comme ces poèmes aux mots bien pesés par Paterson. Comme ce couple formé par les persos d'Adam Driver et de Golshifteh Farahani où l'harmonie semble régner d'un équilibre entre ce qui n'est pas dit, et ce qui est exprimé. Toute la simplicité de ce film vient de cette mesure subtile entre « taire l'inutile » et « exprimer le nécessaire ».

Ce film, c'est quand même le calme absolu. Mais un calme qui réussi à te captiver par la menace sourde qu'il fait forcément exister, celle où un malheur hypothétique viendrait saboter ce ballet du quotidien. Du lundi au lundi, le week-end prend ici la valeur d'un doux climax. C'est la barre de métal prise dans l'engrenage de ce chauffeur d'autobus la semaine. C'est le moment où tout s'arrête, où tout est possible, ou rien n'est possible.

6/6

Auteur:  Karloff [ 06 Mar 2017, 23:41 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Tu fais plaisir, je me sentais bien seul

Auteur:  Jerónimo [ 06 Mar 2017, 23:51 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Le film me reste assez en mémoire.

Auteur:  Erik Vonk [ 07 Mar 2017, 07:30 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Et Adam Driver est vraiment un acteur prodigieux.

Auteur:  Baptiste [ 07 Mar 2017, 09:15 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Karloff a écrit:
Tu fais plaisir, je me sentais bien seul


On est plusieurs à soutenir le film sur ce topic!

Auteur:  Abyssin [ 13 Mai 2017, 23:10 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

boultan a écrit:
"l'eau coule, l'eau coule sur mes cheveux, ça s'appelle la pluie". J'ai du mal à croire qu'il faille dix ans d'études en poésie contemporaine pour enfin déceler le génie là-dedans. Mais c'est très subjectif hein, le fait est que moi, ça m'a paru au mieux anodin, au pire un peu ridicule.
Ouais mais là t'es vraiment malhonnête. C'est un poème d'une fille de 10 ans rencontrée par Paterson, pas par Paterson lui-même. Et je trouve la poésie du film (écrit par un vrai poète qui est fan de Carlos William Williams) très belle au demeurante en anglais. Comme dirait le japonais vers la fin aucun intérêt de la traduire on en perd toute la force.

bmntmp a écrit:
Cette question et cette réponse résument un aspect intéressant du film. Je ne trouve pas Paterson particulièrement talentueux par exemple, il donne l'impression d'un poète raté qui écrit de pâles imitations de son héros William Carlos Williams mais au moins est-il modeste par rapport à ça. Cela résout une interrogation qu'on peut avoir par rapport au film : comme vous l'avez dit, peu importe que l'on considère le poète comme raté ou talentueux, le film n'en reste pas moins valable par n'importe quel bout qu'on veuille le prendre.
Très juste

bmntmp a écrit:
elle sort d'un film en noir et blanc en disant qu'elle a adoré "le fait que ce soit en noir et blanc"
Tu te trompes. Elle dit qu'elle a aimé le film mais ou même si il était en noir et blanc. Un truc comme ça.


Baptiste a écrit:
suis un peu surpris de la violence des propos ici. Pour ma part le film m'a absolument enchanté, de ceux qui nous incitent à trouver dans le banal et le quotidien la source de la beauté. Je partage tout à fait cette vision du bonheur, aux ambitions matérielles et sociales modestes, mais pas dénué d'ambitions spirituelles.

Le film montre parfaitement comment une tâche quotidienne et répétitive peut-être le berceau de la réflexion et de l'inspiration. Il contourne ainsi le cliché habituel du film qui montre un artiste raté s'adonnant à des métiers alimentaires qui le font dépérir (comme Inside Llewin machin des Coen que j'ai pourtant aimé). J'ai en particulier apprécié les séquences de bus, qui sont l'occasion de jolis montages planants en surimpression, exprimant exactement cette idée de l'inspiration par la répétition. La façon de scander les poèmes dit beaucoup également des cahotements de la création, de la vie. La ville de Paterson est splendidement filmée, ça paraît simple, mais c'est sublime.
C'est ça, on pourrait rajouter que le film de Jarmush véhicule un certain art de vivre. J'aime beaucoup la forme, l'apparente simplicité de Jarmush qui rend le film assez puissant dans son imagerie. Il me fait penser à un haïku.

supergontrand a écrit:
où Driver sort du bureau de son chef dans la cour, et celui-ci lui faut quelques pas avec lui et lui met la main sur l'épaule pour le consoler (...
Je vais émettre une hypothèse : si on considère que le bus est un peu une source d'inspiration pour Paterson avec ces discussions quotidiennes volées à gauche et à droite c'est en quelque sorte un petit coup dur sur le moment, la tristesse pour ce compagnon métallique qui l'a accompagné dans son processus de création poétique.


Sinon, je rejoins la team des conquis. Un des Jarmushs que je préfère et encore un des magnifiques films de Cannes 2016 repartis bredouille.

5/6

Auteur:  bmntmp [ 13 Mai 2017, 23:54 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Abyssin a écrit:
bmntmp a écrit:
elle sort d'un film en noir et blanc en disant qu'elle a adoré "le fait que ce soit en noir et blanc"
Tu te trompes. Elle dit qu'elle a aimé le film mais ou même si il était en noir et blanc. Un truc comme ça.


Peu importe, la réplique est une blague par rapport à son obsession du noir et blanc (ce qu'elle fait est bien moche quand même - mais comme je l'ai dit dans la citation plus haut, c'est un film sur l'importance qu'il y a de laisser aux gens exprimer leur créativité, quand bien même cela donne des choses douteuses au point de vue du snobisme) et contribue, entre autres choses, à la rendre très nunuche.

Auteur:  bmntmp [ 13 Mai 2017, 23:55 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Abyssin a écrit:
J'aime beaucoup la forme, l'apparente simplicité de Jarmush qui rend le film assez puissant dans son imagerie. Il me fait penser à un haïku. 5/6


Alors c'était un film pour entrepreneur macroniste en mal de poésie.

Auteur:  Abyssin [ 13 Mai 2017, 23:59 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

bmntmp a écrit:
Peu importe, la réplique est une blague par rapport à son obsession du noir et blanc (ce qu'elle fait est bien moche quand même - mais comme je l'ai dit dans la citation plus haut, c'est un film sur l'importance qu'il y a de laisser aux gens exprimer leur créativité,
On est d'accord. Pas quoté le reste de ta phrase, je trouve le personnage assez attachant dans sa candeur, pas nunuche. Mais bon on va pas refaire le débat des 6 dernières pages.

Lol pour ton allusion politique. De manière générale, je pense être assez réceptif au style de poésie du film et ça me donne envie de creuser les Ginsberg, Williams et consorts. Ca me parle.

Auteur:  Cosmo [ 29 Mai 2020, 17:23 ]
Sujet du message:  Re: Paterson (Jim Jarmusch, 2016)

Bon, c'est relativement superficiel... Ça se regarde, avec ce qu'il faut de plaisir devant ce grand dadais auteur de poèmes de gamins de huit ans, éperdument amoureux d'une nana qui vit ses rêves depuis sa cuisine. Il y a l'humour habituel de Jarmusch, et la galerie de personnages tous droits sortis d'un livre de Bukowski, mais je trouve ça en deçà d'un Dead Man.
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