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La Fête de Saint Jorgen (Yakov Protazanov - 1930)
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Auteur:  Tom [ 07 Juil 2014, 21:07 ]
Sujet du message:  La Fête de Saint Jorgen (Yakov Protazanov - 1930)

Ou Jakov Protazanov...
Aussi titré Le Miracle de Saint-Jorgen. En VO : Prazdnik Svyatogo Iorgena.

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Deux évadés se mêlent à une fête religieuse pour échapper à la police.


J'étais très surpris par le rejet massif que ce film a provoqué à sa projection, à la Rochelle... Il s'agit d'une satire cléricale, évidemment entière et sans nuances, mais témoignant d'un certain acharnement qui empêche d'en faire une œuvre de propagande plate. Par exemple, le fait que les personnages principaux (ceux jouant contre le clergé) ne valent pas mieux que les prêtres : bandits, cyniques, manipulateurs, on les suit moins parce qu'ils tapent sur l'église que parce qu'ils se foutent de tout et de tout le monde, ne pensant qu'à eux-mêmes. Cette bouffée individualiste, à laquelle il faut rajouter le fait que le peuple soit représenté comme une assemblée de moutons (littéralement, dans un passage) heureux de leur soumission, achève d'en faire un film fonctionnant fort différemment de ses contemporains soviétiques.

De ce que j'en connais, il semble de toute façon que Protazanov soit un cas particulier (fuyant la révolution, ne revenant au pays que faussement converti, si j'ai bien compris). Formellement, le film s'en ressent : La Fête de Saint Jorgen a la gueule d'un film américain parachuté en URSS, avec tout son corolaire classique (l'identification entretenue, l'invisibilité de la forme, l'efficacité narrative et comique, se substituent tous aux expérimentations de montage). Plus révélateur encore : on se rend compte que la religiosité moquée est en fait très bien filmée par Protazanov. Dans certains passages (le film dans le film, les grands décors remplis de figurants), on se croirait très exactement chez Demille : la même efficacité dans l'imagerie, dans la composition glorieuse des plans, dans la magnification des foules. Ce qui est au final, peut-être, le signe de toute bonne satire ou parodie : être aussi performante dans l'incarnation des codes moqués que dans leur détournement.

Malgré toute cette maîtrise, le film semble tout de même bizarrement petit. Je rejoins mes camarades de festival sur un point : une semaine après, je n'en retiens quasiment aucune scène... Peut-être déjà parce qu'il faut attendre son milieu (et la supercherie du saint) pour que son pitch se dévoile (et on a de fait pas vraiment le temps d'en voir tout le potentiel correctement exploité) ; ou peut-être parce que la résolution un peu précipitée, et notamment sa toute fin, réduisent le tout à la farce.

On sent parfois, dans les moments les plus inspirés, poindre de cette charge caricaturale le portrait plus ambigu de l'église comme maison de fous (complexe et retorse, avant d'être mauvaise), mais on reste malheureusement trop dans cette attaque unilatérale, parfois réjouissante mais aussi, forcément, un peu limitée.

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