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MessagePosté: 13 Déc 2023, 17:32 
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Synopsis : alors que le pensionnat de Barton, dans les environs de Boston, ferme ses portes pour les traditionnelles vacances de Noël, c'est le sévère professeur d'Histoire antique qui est, avec la cuisinière Mary, chargé de surveiller les rares élèves encore présent à l'internat. Parmi eux se trouve Angus, une forte tête à deux doigts de l'expulsion... et surtout en cette année 1970, de la conscription.
(En gros, c'est comme Les Diaboliques sans le meurtre, la manipulation, le saphisme mal digéré... tout ce qui est cool)


Je connais peu la carrière d'Alexander Payne dont j'attribue un film sur deux à Jason Reitman et inversement, donc je ne risque pas de replacer l'ouvrage dans la filmo. Tout du moins, j'adore sans retenue L'Arriviste qu'il a réalisé il y a... grosso modo, vingt-cinq ans. Mais j'aime bien le sujet des improbables rencontres de Noël et le contexte toujours attractif des 70s de la déprime a fait le reste.

C'est un film-artichaut où chaque séquence est une feuille qui s'enlève pour dévoiler le cœur des protagonistes, trio un peu paumé en cette saison.
Chacun a connu une perte, soit récemment, soit longtemps, et s'est forgé une carapace/cocon qui lui permet de fonctionner. Aucun ne semble d'ailleurs pressé de se réinsérer dans la collectivité et de replonger dans le grand bain, ce qui tranche avec cette période de communion avec les autres, et donc exacerbe l'isolement.
Le jeunot par exemple, veut bien passer ses vacances sur une plage paradisiaque avec sa mère mais refuse d'admettre son remariage et sa nouvelle famille. La cuisinière vit dans le souvenir de son fils mort au Vietnam et demeure à Barton car c'est le dernier endroit où ils ont passé du temps ensemble (le fils était élève, ce qui permet aussi de signifier les progrès et les limites de la déségrégation par la bande). Enfin, le prof tatillon ne semble vivre que pour son boulot et s'est littéralement réfugié entre les murs de cette honorable institution dont il applique à la lettre le règlement (on apprendra plus tard pourquoi, comme il se doit).

Payne joue sur du velours avec un scénario soigné de David Hemingson, visiblement venu de la télé : un coup d’œil à sa fiche imdb et c'est du American Dad, du How I met your Mother, du Bones et des trucs dont j'ai jamais entendu parler qui s'affichent. Pour autant, il ne démérite pas avec ce détournement du postulat de l'Attrape-Coeurs en conte de Noël.
Rien des secrets enfouis ou des traumas passés des personnages n'est nouveau ou original mais tout est agencé en bon boulot d'équilibriste avec des éléments dialogués (la petite lueur dans le regard du prof quand l'élève s'exclame "Alea Jacta Est" après qu'il lui a demandé de ne pas franchir le Rubicon) ou visuels (les noix cassées quand on parle de la vie de couple du prof) qui révèlent à chaque fois un peu plus ce qui couve sous la surface. Car cette vie intérieure cachée est recouverte par les conventions et les places assignées par la société, telle cette épaisse couche de neige enveloppant le décorum plaisant à l’œil : que ce soit le pensionnat cossu qu'on parcourt de fond en comble, ou bien les rues de Boston lors de l'escapade de rigueur de nos amis malgré eux.

Payne et Hemingson évitent l'éloge de la famille, évacuent Dieu de l'équation plusieurs fois, et s'en remettent à une apologie douce-amère de l'individualisme et de l'attention portée aux autres pour savoir quand on peut aider et quand on empiète sur le choix personnel à juger de ce qui est bien ou mal. Chacun sa croix mais on peut aider à la porter sur un bout de chemin. C'est trois fois rien, mais le bon cinéma ricain demeure encore parfois doué pour l'énoncer.
Très américain aussi ce parallèle intéressant
entre l'ouverture progressive à la transgression de ce prof arcbouté sur son propre code moral et le fait que l'étudiant aux cheveux longs, qui lui veut défier son pater, finisse par rentrer dans le rang dans la conclusion. Une manière de rappeler que la banque rafle toujours la mise.
.
Il y a aussi toute ces infirmités mises en avant qui renvoient au thème de la perte qui parcourt l'ensemble.

Il y a une foule de petits détails intéressants, une distribution sympathique et impeccable et quelques moments réellement émouvants sans tomber dans le glucose... et pourtant au milieu de tout ça, ils ont réussi à se planter sur l'essentiel dès l'ouverture :

JAMES BOND NE PORTE PAS DE MAILLOT DE BAIN DANS AU SERVICE SECRET DE SA MAJESTÉ

Merde à la fin.

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Dernière édition par JulienLepers le 13 Déc 2023, 19:47, édité 2 fois.

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MessagePosté: 13 Déc 2023, 17:36 
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J'espère toujours qu'il retrouve le niveau de Sideways.


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Pareil, je suradore démesurément Election et Sideways (et aime beaucoup About Schmidt et The Descendants) mais depuis son truc sympa sans plus (Nebraska) et son foirage (Downsizing) j'ai l'impression qu'il a perdu son mojo... Curieux de celui-ci mais je sais pas si je pourrai le voir d'ici la fin de l'année.. Ca fait plaisir quand même de voir Giamatti de retour, je l'adorais ce mec.

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MessagePosté: 13 Déc 2023, 17:54 
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Je suis tombé sur le trailer au ciné sans savoir que c'était Payne et ça a vraiment la gueule d'un proto Cercle des poètes disparus programmatique et mièvre. J'étais surpris de voir les bonnes critiques US. Du coup je suis curieux.

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MessagePosté: 13 Déc 2023, 18:06 
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Art Core a écrit:
Je suis tombé sur le trailer au ciné sans savoir que c'était Payne et ça a vraiment la gueule d'un proto Cercle des poètes disparus programmatique et mièvre. J'étais surpris de voir les bonnes critiques US. Du coup je suis curieux.

Tout pareil, j'y vais ce soir après Past Lives du coup.

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MessagePosté: 13 Déc 2023, 18:57 
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Je trouve pas que la BA soit complètement représentative du film, d'autant qu'elle laisse un pan sur le côté. Ça évite en tout cas le pastiche d'époque, ce que pouvait laisser craindre le côté vieux logos + typo du générique que le trailer utilise aussi (c'est pas le Planet Terror des films sur la morosité estivale, en gros).

Pour la comparaison avec Le cercle des poètes disparus, sachant que j'aime pas beaucoup et que je l'ai pas revu depuis l'époque de la VHS/Canal, je dirais que celui-ci joue un peu contre cette image d’Épinal du prof qui va te faire ouvrir les yeux sur la vie que tu pourrais avoir quitte à te monter contre l'oppression parentale (d'ailleurs, maintenant que vous le citez, c'est un peu tout l'inverse). Ici, le prof est un sale con avec ses élèves, hyper-rigoriste et pas charismatique pour deux sous. Il a toute une batterie de préceptes qui vont s'écraser sur le mur de la réalité et notamment, je trouve ça fort beau, quand après la sempiternelle tirade sur "apprendre du passé pour comprendre le présent " (ce qui n'est pas faux en soi), il doit rétropédaler sur le concept dans une discussion sur un autre sujet avec son élève (je rentre pas dans les détails, vous verrez). Sauf que c'est jamais vraiment explicité, c'est juste en qu'en y repensant, tu te dis "ah oui, en fait, il est confronté à la propre limite de son point de vue". C'est un aspect que je trouve chouette.

Bizarrement, si je dois le rapprocher d'un autre film, vu le contexte et le nuage noir du Vietnam qui plane au-dessus des persos, je choisirai Jardins de pierre de Coppola, avec James Caan qui tente d'instruire des soldats pour éviter de se faire zigouiller en arrivant là-bas, mais en pure perte. Y a un peu le même dilemme qui pointe à un moment donné. (sauf que le Coppola est sinistre au possible)

Pour résumer le "message" du film, il y a une séquence toute conne où l'élève doit aider à porter les bagages de la cuisinière pour monter les innombrables étages de la baraque de sa sœur (avec des marches verglacées) et quand il a fini, il comprend qu'il doit aussi aider Mary à monter. Y a un peu tout un truc sur les bonnes actions, la bonne conduite, le sacrifice de son ego... des trucs un peu wilderiens sur les bords que j'ai bien aimés.

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MessagePosté: 13 Déc 2023, 19:06 
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Je vais être bon pour une expédition à l'Arlequin demain.

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JulienLepers a écrit:
Je trouve pas que la BA soit complètement représentative du film, d'autant qu'elle laisse un pan sur le côté. Ça évite en tout cas le pastiche d'époque, ce que pouvait laisser craindre le côté vieux logos + typo du générique que le trailer utilise aussi (c'est pas le Planet Terror des films sur la morosité estivale, en gros).

Pour la comparaison avec Le cercle des poètes disparus, sachant que j'aime pas beaucoup et que je l'ai pas revu depuis l'époque de la VHS/Canal, je dirais que celui-ci joue un peu contre cette image d’Épinal du prof qui va te faire ouvrir les yeux sur la vie que tu pourrais avoir quitte à te monter contre l'oppression parentale (d'ailleurs, maintenant que vous le citez, c'est un peu tout l'inverse). Ici, le prof est un sale con avec ses élèves, hyper-rigoriste et pas charismatique pour deux sous.

Oui moi je voyais pas tant le Weir dans la BA que, comme tu le dis dans ton premier message, le récit programmatique d'un groupe de laissés-pour-compte qui vont apprendre à se connaître et à s'apprécier dans ces circonstances. Le truc feel-good (de Noël en plus!) qui s'encanaille vaguement d'une patte indé pour le flow.

Et c'est à la fois exactement ça mais aussi un peu plus malin et moins joli et enrubanné.

Disons que ça parvient parfois à déjouer les attentes en avortant des pistes délibérément plantées (oui mes 3 métaphores vont pas ensemble)
le prof ne se maque pas avec la collègue, la cuisinière ne se maque pas avec le concierge, l'ado ne vit pas une expérience extraordinaire avec la meuf rencontrée à la fête
et ça ne maquille pas la tristesse de ses protagonistes
le père malade de l'ado, le fils mort de la cuisinière, la vie claquée au sol du prof qui pue
. Et les répliques du professeur témoignent d'un vocabulaire exquis.

Après, ça reste beaucoup trop long (2h13 pour ce type de film, faut aller se faire foutre). D'ailleurs, je me suis assoupi un peu sur la toute fin.

C'est donc effectivement le meilleur Alexander Payne depuis Sideways (Giamatti powa) mais c'est pas dur en ce qui me concerne vu que c'est le seul que j'apprécie (avec son segment de Paris je t'aime). Dans ces deux films, il n'est pas à distance de ses personnages. Ce n'est plus "faisons courir une star en tongs c'est cocasse" ici. C'est Monsieur Schmidt (moyen) en plus sincère.

PS : lu après que c'était tourné en numérique. Chapeau pour l'imitation de la péloche.

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MessagePosté: 15 Déc 2023, 13:29 
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Beaucoup aimé. Certes, ce n'est pas d'une originalité folle. Mais c'est bien filmé. superbe BO. Interprètes très justes. C'est à la fois doux et amer. C'est aussi particulièrement bien écrit et dialogués. Malgré la gravité des sujets, cela reste une belle histoire de Noêl même si sans aucune guimauve. Pas de happy end ni de sur drame. La vie dans sa douc noirceur avec les bons et les mauvais moments. Il n' y aussi aucune hagiographie d'un enseignant ( s'éloignant en cela très fort du cercle des poètes disparus). C'est pour moi son meilleur film depuis Sideways.


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MessagePosté: 17 Déc 2023, 15:22 
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Belle remontada d'Alexander Payne après une décennie de passage à vide. Au début je craignais un film précieux et aspirateur d'énergie vitale sur 2h13 mais bien vite, après ma sieste et lorsque l'intrigue se recentre sur le trio avec ces trois épatants acteurs, j'ai trouvé ça super.

Ça répond à une certaine formule de cinéma indépendant+ avec son juste dosage de réalisme et de gag, d'implants/payoff et d'imprévisible, de frustration et de satisfaction, mais c'est tellement bien fait. Payne est parfait pour le sujet et il dirige ses acteurs à merveille. Le jeune là, Dominic Sessa, sort de nulle part et il est génial.

En tous cas je me disais pendant la séance que c'est le genre de film qui, sous cette forme, n'existe juste pas en France. Imagine-t-on un scénariste non réal (incroyable d'ailleurs le CV télévisuel de l'auteur qui vient et nous pond ça) écrire ce genre de film (une dramedy de Noël neurasthénique de 2h13) et voir un mec style Klapisch venir le réaliser sans co-signer l'écriture ? Impensable. C'est vraiment un projet industriellement tellement américain, c'est leur spécialité quoi.

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MessagePosté: 17 Déc 2023, 20:48 
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D'ailleurs c'est inspiré d'un Pagnol.

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MessagePosté: 17 Déc 2023, 21:31 
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Chier, je sens que je vais devoir choisir entre celui-ci et Past Lives avant la fin de l’année (aka mon top).

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MessagePosté: 17 Déc 2023, 22:14 
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Past Lives est meilleur.

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le film surjoue le côté old school.
old school des années 70 évidemment, dès les logo d'origines, l'atroce (moralement) imitation pellicule, la musique avec cat stevens et l'ombre d'un harold et maude and co.
mais aussi old school plus récent, l'époque pas si lointaine où alexander payne prospérait, percait dans la vague des nouveaux réalisateurs de 1999, était nommé 2 fois aux oscars avec des films pour adultes de 2 heures, qui coutaient un peu d'argent mais pas énormément, qui rapportaient un peu d'argent mais pas énormément, qui s'adressaient exclusivement à des adultes avec des histoires originales, sans être des bangers ou quoi, juste des bons petits films.

depuis il s'est totalement planté avec le nul downsizing qui a bidé, il a été annoncé sur plein de choses qui ne se sont pas faites (l'article de technikart raconte que jake gyllenhall a rencontré bigedain en voulant lui faire écrire un film pour payne....!), mais il est vraiment précisément sur le créneau dont plus personne ne veut, probablement même pas assez prestigieux pour que netflix consente à perdre des millions pour pouvoir accrocher son nom sur leur liste de conquêtes.

donc j'ai trouvé difficile d'apprécier le film pour lui-même, tellement le film incarne et revendique cette identité en plantant un piquet et en hurlant dans un mégaphone "c'était mieux avant !".

et il se trouve que je suis d'accord que c'était mieux avant, que les américains savaient faire de bons films et que c'est quand même dommage qu'ils aient décidé d'arrêter d'un coup, comme ça alors que je suis bien persuadé qu'il y a toujours un public qui ne demande que ça (je me suis égaré à faire un parallèle entre les bons films américains et la sociale-démocratie, le fait est que 2h13 à ce rythme ça laisse le temps au cerveau de s'évader un peu, mais c'est aussi un plaisir comparé à l'hystérie générale de leur cinéma actuel).
alors il y a le portrait d'un véritable être humain, qui n'est pas défini par le bien ou le mal mais par les nuances de l'existence - et ses médiocrités, fondamental du regard de payne qui m'a toujours beaucoup plu. il est joué par un acteur absolument exceptionnel, paul giamatti, qui est moche et pas refait et pas musclé et dont la piètre carrière en dit long sur ce sacrifice volontaire de cette industrie de ce tellement de ses talents. on y découvre un jeune acteur, dominic sessa, lui aussi exceptionnel, qui finira peut-être sur une pub dior mais qui donne plus l'impression d'être un vrai bon acteur pas formaté qui se lance dans cette industrie qui produit 4000 trucs par an mais semble incapable d'offrir à des jeunes comme lui des rôles comme ça, réaliste, humain, riche, sans être très beau ni très musclé, j'espère qu'il réalise sa chance. da'vine joy randolph est peut-être plus attendue mais parfaite aussi, un rôle de femme noire qui correspond à une réalité sociale et humaine, traitée avec attention et respect, sa relation avec le prof est très belle (et réaliste, au final).
le tout dans cette histoire parfaitement écrite, qui avance doucement mais où chaque mot est pesé, jamais ostentatoire, digne d'un roman, quelle foi il faut avoir pour se lancer dans l'écriture d'un truc pareil et se dire que ça se fera dans l'industrie actuelle... c'est un film qui ne marquera rien du tout, qui sera aussi facilement oublié que nebraska mais qui réussit autant en tant que tract politique révolutionnaire pour la survie d'une forme d'art que comme le simple portrait de 3 personnages qui ont chacun leur place parfaitement définie dans la société tout en essayant d'exister comme individus, pleinde défauts et de contradictions, au sein de celle-ci.

j'ai bien aimé.


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MessagePosté: 26 Déc 2023, 11:51 
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La scène du père à l'HP est très belle (mais pourrie
par le motif scénaristique facile et un peu racoleur de la crise de violence et de la boule de Noël transformée en arme. Même s'il ne s'était rien passé la mère aurait sans doute bien fini par apprendre la visite, et l'idée que l'attente psychologique ainsi créée était insupportable à la mère se suffisait très bien - mais dans ce cas, sans l'agression, il aurait été possible aux institutions de donner raison au prof et au fils
), mais j'ai malgré tout eu l'impression de voir un objet culturel sans beaucoup d'enjeu plutôt qu'un film : des bouts de la Dernière Corvée (avec un cynisme méta un peu post moderne : c'est le gardien que le système élimine au terme du voyage, plutot que le prisonnier) rissolés avec la casserole du Breakfast Club, le fumet des premiers Wes Anderson période Tenenbaum, le sel du Cercle des Poètes, les décors et coiffures de If, les médicaments de Will Hunting.

Tout cela est sympathique, les restes sont bien accomodés. Le retour dans les années 70 me semble avoir pour principale justification de vider le film du moindre enjeu social. Il évacue par exemple la possibilité d'une relation entre le prof et l'élève. On conserve la lucidité sociologique et politique de la contre-culture de l'époque tout en en retirant la colère, comme si cette amertume et cette passivité étaient une forme de tact, ainsi que la savoir du passé sur notre présent. Et le travail d'écriture est trop visible, il y a toujours un personnage ou une situation conçus pour neutraliser mécaniquement tous les autres (l'horrible mère qui annule le sous-texte féministe porté par les trois autres femmes du film. De manière plus dicrète la soeur de la cuisinière la retire de l'histoire au moment du climax, où elle aurait pu avoir sa scène et sa colère- et épargne commodément au recteur et au scénario de devoir virer un personnage noir ethiquement irréprochable mais techniquement complice d'une "faute".
Le faux-départ en film de retenue puis le deus ex machina de l'hélicoptère sont aussi des facilités et des coutures pparentes du scenario qui permettent de rendre le prof beaucoup plus sympa, mais sans évolution psychologique : la démesure grotesque de l'ordre sociale vaut comme un évènement individuel).
Je préfère des films comme The Green Book des Farelly, peut-être moins élégants et plus démagogiques (selon les critères du forum), mais qui n'ont pas peur de montrer une conclusion morale ou politique, de changer leur personnage (ici le mécanisme est plutôt de reconnaitre une identité morale partiellement et érotiquement cachée pour la conserver à froid), ce qui resserre et accélère leur propos.

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 26 Déc 2023, 19:59, édité 3 fois.

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