Forum de FilmDeCulte

Le forum cinéma le plus méchant du net...
Nous sommes le 23 Avr 2024, 15:07

Heures au format UTC + 1 heure




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 8 messages ] 
Auteur Message
MessagePosté: 17 Jan 2024, 10:29 
En ligne
Meilleur Foruméen
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Nov 2005, 00:46
Messages: 85332
Localisation: Fortress of Précarité
aka 英雄本色('True Colors of a Hero') aka Le Syndicat du crime

Image

Ho et Mark, deux gangsters de Hong Kong, coulent des jours heureux sous les ordres d'un parrain vieillissant. Tout irait pour le mieux si Ho n'avait un frère cadet qui a choisi de faire carrière dans la police...

Je veux dire :

Image
Image
Image
Image
Image
Image
Image
Image
Image
Image

Ce sont les huit premiers plans du film.

Le choix du premier témoigne à lui seul d'une personnalité absente jusqu'à présent dans les films de John Woo. Un simple gros plan de profil d'une personne allongée.
Puis un plan stylisé de partout : de face au grand angle en N&B et au ralenti sur une silhouette découpée à contre-jour contre de la vapeur. Il tombe dramatiquement.
L'homme se réveille en sursaut. Double raccord dans le mouvement sur le geste répété du mec qui se redresse pour arriver à ce plan "1 image = 1 histoire" de son dos, le pyjama rendu translucide par la sueur révélant un tatouage de gangster. Jesus Fucking Christ.
Gros plan de l’œil qui se ferme. Titre.

En huit plans, le mec a tout posé avec flow. Huit plans plus incarnés que toute sa carrière.

J'ignorais qu'il s'agissait plus ou moins d'un remake officieux d'un film chinois de 1979 avec le même titre (original, pas le titre anglais joliment plein d'espoir ni le titre français bêta) pour la trame du bandit sortant de taule qu'un gang essaie de recruter, mais qui pioche également dans un autre film chinois (lui-même remake d'un film indien, c'est un délire l'Asie) pour la trame de deux frères de chaque côté de la loi.

Et cette simple idée complexifie intelligemment la dramaturgie du film, offrant à Woo l'opportunité de traire le maximum du potentiel tragique de son récit qui va donc montrer au travers de son trio de personnages quelles sont "les vraies couleurs d'un héros". Comme je l'avais compris en découvrant ses films d'arts martiaux et de sabre, c'est vraiment la transposition contemporaine de ses histoires sur l'honneur et la fraternité mis à l'épreuve par le crime et la corruption des puissants. Les flics et les gangsters ont remplacé les guerriers shaolin et les seigneurs de jadis mais les notions susmentionnées sont éternelles et c'est comme si, en vivant avec son temps, Woo parvenait à sortir de l'ombre des Chang Cheh et des King Hu en mariant ces archétypes à ses références melvilliennes pour élever le tout.

Je pense qu'il a besoin des apparats du genre pour oser la grandiloquence ou plutôt la grandeur d'âme mais que le détour par un film dramatique défait de "béquilles" même comiques (The Time You Need a Friend donc) lui a permis d'humaniser ses personnages.
Par conséquent, ici, quand Ho retrouve Mark et découvre qu'il est devenu un simili-clochard estropié, il y a un échange de regards muet entre Ho debout et Mark assis dans un parking, la bouche encore ouverte avec la main qui y portait la bouffe suspendue dans les airs, puis les yeux de ce dernier s'embuent, un ange passe, et ils se prennent dans les bras l'un de l'autre. Et j'ai chialé, putain.

C'est trois fois rien, comme ces huit plans du début, mais c'est essentiel.
Comme dit Saladin à la fin de Kingdom of Heaven quand on lui demande "What is Jersualem worth to you?"
"Nothing......everything."

Faut dire que Chow Yun-Fat est extraordinaire. Non seulement il fait montre d'un charisme effortless, sa taille, sa chevelure, le flow que Woo lui confère avec son imper et ses lunettes noires, mais il est incroyable tant dans les scènes de camaraderie que les scènes d'émotion. Et cette scène où il traverse le couloir du restaurant au ralenti avec une meuf, planquant des flingues dans des pots de fleurs pour son échappée, voilà putain, c'est ça qu'on veut, une mise en images inspirée! Les gunfights sont encore un peu rudimentaires - y a déjà le double gun et des ralentis mais pas encore de bullet ballet - mais font le taf et surtout, c'est finalement le reste que je kiffe...?

Le film fonctionne vraiment en tant que drame pur. C'est simple mais c'est incarné et c'est vraiment la clé.
Et heureusement, ça culmine justement au coeur de l'action, tout étant construit pour en arriver à ce moment où Kit doit comprendre que l'honneur et la loyauté ne nous sont pas dictées par notre fonction mais par les liens de la fraternité, par ceux qui sont loyaux et honorables envers toi popopoooooooo!!!

Et ce qui suit ne fait que s'améliorer...

_________________
UBERLINKS toujours dispo sur OCS et MyCanal!
Image


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 11:14 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 14 Déc 2018, 20:03
Messages: 1633
Film Freak a écrit:

Et cette simple idée complexifie intelligemment la dramaturgie du film, offrant à Woo l'opportunité de traire le maximum du potentiel tragique de son récit qui va donc montrer au travers de son trio de personnages quelles sont "les vraies couleurs d'un héros". Comme je l'avais compris en découvrant ses films d'arts martiaux et de sabre, c'est vraiment la transposition contemporaine de ses histoires sur l'honneur et la fraternité mis à l'épreuve par le crime et la corruption des puissants.
(...)

Faut dire que Chow Yun-Fat est extraordinaire. Non seulement il fait montre d'un charisme effortless, sa taille, sa chevelure, le flow que Woo lui confère avec son imper et ses lunettes noires, mais il est incroyable tant dans les scènes de camaraderie que les scènes d'émotion
(...)
et surtout, c'est finalement le reste que je kiffe...?


Mais oui, mais trop.

Pur plaisir que cette rétro.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 11:32 
En ligne
Meilleur Foruméen
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Nov 2005, 00:46
Messages: 85332
Localisation: Fortress of Précarité
Coeur avec les flingues.

_________________
UBERLINKS toujours dispo sur OCS et MyCanal!
Image


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 12:09 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 30 Mar 2012, 13:20
Messages: 10699
oui un film que je bonifie à chaque révision. A l'époque de leur découverte, je préférais le 2 plus énorme mais maintenant mon opinion s'est inversée.

Chow Yon Fat, Ti Lung, Leslie Cheung ont un charisme de dingue.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 13:29 
Hors ligne
Vaut mieux l'avoir en journal
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 04 Juil 2005, 15:21
Messages: 22405
Localisation: Paris
A l'époque, sorti immédiatement après A toute épreuve (tir groupé avec le 2 et Une balle dans la tête, cette folie), ça m'avait même déçu. Je serais curieux de le revoir.

_________________
Anthony Sitruk - Bien sûr, nous eûmes des orages
(168 pages, 14.00€)
Commande | Site perso


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 22:13 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 21 Aoû 2021, 19:41
Messages: 1851
C'est simple, et ce dans le bon sens du terme. Difficile de faire plus universel comme thème, et donc plus solide, que la loyauté en amitié entre hommes. C'est déjà là dans Gilgamesh : l'amitié qui canalise le déséquilibre de la solitude, qui se forge dans les affrontements et le triomphe contre des ennemis. Ce qui régit les unions sentimentales varie au gré des cultures et des époques. Ca, non.

Ce n'est pas pour rien que l'antagoniste est seul, un traître arriviste, malhonnête et opportuniste, entouré d'hommes de mains (des employés). Il n'a à s'occuper que de lui-même. Même si le film reste objectivement rudimentaire à ce sujet (la ville n'existe pas trop, ni le reste de la société, tout est centré sur les corps et les visages), le rapport particulier de Woo au crime organisé y est déjà prégnant, emprunt d'un bourgeon d'analyse structurelle : c'est une prédation qui mise sur l'atomisation sociale et sociétale, le mondialisme (ce sont des dollars qui sont contrefaits, il y a des livraisons d'héroïne par bateau etc.), l'isolation, la solitude... des maux on ne peut plus modernes. C'est la loyauté filiale et fraternelle qui fait prendre conscience à Ho qu'il est temps de raccrocher. Celle, amicale, de Mark qui lui fait sacrifier son statut et dégringoler socialement, jusqu'à s'avilir etc. La récurrence du "une fois qu'on a plongé dans l'underworld, on n'en ressort plus" est soit une maladresse, soit une fausse-piste : quoi qu'il en soit, ce n'est jamais vraiment incarné. Ce qui se joue, c'est à quel point cette amitié aux rouages atemporels déjoue la corrosivité du milieu criminel, symptome d'un mal bien plus vaste.

J'aurais des choses à rajouter sur la noirceur évoquée par BCPLV dans le topic Silent Night, mais on va laisser Film Freak remonter le fil tranquille jusque là (même si on sent qu'il se dépêche, ce qui n'est pas plus mal).

_________________
Looks like meat's back on the menu, boys!


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 17 Jan 2024, 22:55 
Hors ligne
Expert

Inscription: 30 Sep 2016, 19:39
Messages: 5309
Le cinéma HK entre 1985 (Police Story) et la rétrocession (Made in Honkong de Fruit Chan), jamais rien n'est arrivé à cette hauteur, tellement de films géniaux dans l'intervalle (et un peu après), avec des acteurs incroyables comme Francis Ng, Anthony Wong, les deux Tony Leung, Lau Ching-wan (regardez Dr. Mack ou He Ain't Heavy, He's My Father sans pleurer), sans parler du goat Chow Yun Fat.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 18 Jan 2024, 02:21 
En ligne
Putain, sérieux mec
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 24 Juin 2009, 12:09
Messages: 5575
Made in Hong Kong est une de mes découvertes préférées de 2022.

C'était ouf de voir un réal aussi jeune et conscient de ce qui se joue dans son pays et son cinéma. C'est à fleur de peau et ultra beau avec ce côté presque cinema guerilla dans un film pourtant si léché visuellement. Ultra poétique et comme fait dans l'urgence.

Je repense à ces personnages, ces plans, ce propos complexe sur la jeunesse hyper souvent.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 8 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure


Articles en relation
 Sujets   Auteur   Réponses   Vus   Dernier message 
Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. A Better Tomorrow II (John Woo, 1987)

Film Freak

3

183

19 Jan 2024, 22:04

Müller Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Nomads (John McTiernan - 1986)

Narrateur

13

2005

21 Jan 2021, 23:25

Cosmo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Big Trouble in Little China (John Carpenter, 1986)

Film Freak

5

1793

02 Oct 2022, 00:15

Vieux-Gontrand Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La Folle journée de Ferris Bueller (John Hughes - 1986)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3, 4 ]

Tom

48

4585

27 Déc 2012, 11:00

Karloff Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Basil, détective privé (Ron Clements, John Musker, Burny Mattinson, David Michener, 1986)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3 ]

Blissfully

31

3606

11 Avr 2020, 14:33

Qui-Gon Jinn Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. The Tomorrow War (Chris McKay, 2021)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

deudtens

18

1402

07 Juil 2021, 21:18

Xavierovitch Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. This Time Tomorrow (Shane Bissett - 2012)

Qui-Gon Jinn

2

1004

24 Juil 2018, 16:16

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Edge of Tomorrow (Doug Liman, 2014)

[ Aller à la pageAller à la page: 1 ... 8, 9, 10 ]

Film Freak

147

12404

06 Avr 2015, 16:26

JeanJacquesSchool Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Escape from tomorrow (Randy Moore - 2013)

Le Cow-boy

6

1296

26 Mai 2014, 08:01

Le Cow-boy Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Sky Captain and the World of Tomorrow (Kerry Conran, 2004)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

the black addiction

23

2315

10 Nov 2008, 18:10

deudtens Voir le dernier message

 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Qui-Gon Jinn et 16 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO
Hébergement mutualisé : Avenue Du Web