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Mais qui a tué Harry ? (Alfred Hitchcock - 1955)
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Auteur:  Tom [ 02 Oct 2010, 10:15 ]
Sujet du message:  Mais qui a tué Harry ? (Alfred Hitchcock - 1955)

The Trouble with Harry en VO. Petits spoilers…

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Un matin d’automne, dans les collines du Vernont, un enfant découvre le corps d’un inconnu. Mais il n’est pas le seul : très vite, chacun des habitants du village se persuade qu’il est le coupable du meurtre. Le cadavre devient l’attraction de la journée, enterré et déterré à répétition, sans que personne ne songe une seconde à prévenir la police…


C’est pas très beau à voir, un Hithcock en sous-régime. Et pourtant, le pitch et l’idée (le mélange comédie/suspens) donnaient bien envie…

Hitchcock, au-delà d’un style identifiable, c’est quand même surtout le talent de trouver des idées de situation et de découpage, bref, des "idées de cinéma" simples, évidentes et brillantes, qui tiennent haut et cohérentes des scènes entières. Et seulement après vient ce style, cette espace d’élégance et d’épure qui fait le ménage autour pour enlever le superflu et bien donner à apprécier la configuration de base (ce côté ludique : regarde, spectateur, ce que j’ai préparé pour toi).

Le truc, c’est que quand, comme ici, les idées en question ont abandonné le navire, on se retrouve avec les restes : beaucoup d’épure sans rien à mettre en valeur, des scènes toujours aussi délimitées et fermement tenues, mais sans rien de bien palpitant à y suivre. Ca donne au final une grosse sensation de vide un peu gênante, d’ennui aussi, pour une mise en scène pas si brillante que ça, même si l’élégance sauve les meubles (en fait ca me fait un peu penser au côté absent et feignasse de La main au collet, sauf que là c’est non-stop). Le film souffre pas mal, aussi, de l’héritage voyant du théâtre de boulevard avec ses retournements artificiels et son manque de rigueur, bien pénible en début (putain que c’est laborieux à démarrer !) et fin de film…

Le reste du temps, une fois l’énervement passé, il y a quand même un climat qui s’installe, un ton de ballade automnale tranquille (des trucs très simples comme le plaisir de personnages qui se connaissent pas – ou peu – de se retrouver ensemble, en groupe, c’est très communicatif). L’approche complètement amorale, aussi : personne a l’air de se rendre compte que quelqu’un est mort, ce flegme est le gros point fort du film. La bourgade isolée semble avoir loupé quelques notions d’éthique primaire, et le mélange de personnages tous aussi doucement tarés les uns que les autres est très sympa, d’autant que le seul type qui semble raisonner normalement et comprendre la gravité de l’acte est traité comme un trouble fête casse-couille (cf la scène de la pièce à conviction, vraie bonne idée, où le naturel de l’ambiance "tea party" l’emporte de force sur la logique la plus basique). Et enfin il y a l’excellente Shirley MacLaine qui trône en haut du quatuor d’acteurs, avec un jeu tout doux façon "folle mais c’est pas grave", ses scènes sont de loin les meilleures.

Donc voilà, c’est plaisant, il reste sans doute quelques bonnes idées discrètes à prendre (le corps objet dont on ne voit finalement jamais le visage, des trucs comme ça…), des choses assez surprenantes (les allusions sexuelles cash), mais globalement c’est quand même surtout un peu chiant. Mon premier Hithcock raté, yeah !

3/6

Auteur:  Castorp [ 10 Mar 2016, 21:08 ]
Sujet du message:  Re: Mais qui a tué Harry ? (Alfred Hitchcock - 1955)

J'aurais pu (enfin, voulu), encore une fois, écrire mot pour mot la critique de Tom.
Je trouve que c'est un Hitchock extrêmement faible (donc, un film correct), qui n'arrive à exister que pour faire la blague, bien que sa crudité pince sans rire le sauve souvent de l'ennui.

Il n'en reste pas moins que j'ai trouvé le film vraiment petit, et malheureusement, souvent chiant.

3/6

Auteur:  Gontrand [ 11 Mar 2016, 18:01 ]
Sujet du message:  Re: Mais qui a tué Harry ? (Alfred Hitchcock - 1955)

Je partage votre sentiment d'ensemble, mais entretiens avec un rapport inverse vis-à-vis des deux parties du film.
Il m'a déçu, pourtant je reconnais tout ce que Daney dit sur lui pour le défendre est vrai et se trouve dedans, mais je trouve la critique plus profonde que le film. Dans le fond je comrprends les réserves de Sadoul.

J'aime bien le début, la mise en place du petit village du Vermont, les plans sur la couleur automnale des arbres, l'attention sur le paysage (tout comme dans "l'Inconnu du Nord Express" peu de choses me touchent, sauf le lever de soleil sur le parc d'attraction, dont j'ai plusieurs fois rêvé après la vision du film).
Je suis amusé par le portrait du peintre raté, de la vieille fille, un peu veules, mais sans monstruosité, (au contraire des personnages de Lang) trop conscients d'eux-mêmes pour prendre le risque de se détruire en voulant toucher autrui (
et apparemment le mort, un harceleur conjugal vraisemblablement violent, était encore plus méprisables qu'eux, l'attitude de Shirley McLaine n'est pas si incompréhensible qu'elle le paraît
).

Mais une fois que l'intrigue démarre pour moi et s'enferme dans les intérieurs, l'intérêt retombe.

J'ai auissi l'impression qu'après guerre, Hitchock ne s'est mis à illustrer qu'un seul type de psychologie. Les personnages de "la Corde", "de l'Inconnu du Nord-Express", "d'Harry", "de Vertigo" sont presqu'interchangeables, ce sont des types et les situations varient peu.
Hitchcock est plus un anthropologue positiviste qu'un romancier, il arrive à reconstruire des psychologies et des types moraux, mais pas des mondes. C'est plus Zola que D.H. Lawrence.
Ses films de la période anglaise me semblent plus forts. Je ne les connais pas très bien, mais aime bien les "39 Marches" et "l'Agent Secret" alors que les personnages sont moins dessinés. Ils s'appuient sur la situation plutôt que sur l'intuition du caractère "archétypal" d'une seule psychologie.


Je crois que j'ai aussi un problème avec Shirley McLaine. Alors que dans la vraie vie, le style de femme qu'elle joue m'émeut souvent (j'aime bien l'expression "folle mais c'est pas grave"), je trouve qu'elle le surjoue. Dans "Comme un Torrent" elle est plus mauvaise que les quatre actrices à qui elle est opposée (même Betty Lou Keim, l'ado gâtée en déroute oedipo-suicidaire, joue mieux), qui sont plus ambigues et finalement plus émouvantes que l'aspect de chat blessé de McLaine, et cela malgré leur bovarysme surligné au stabilo, de sorte que l'on comprend trop bien pourquoi Sinatra hésite à saisir "l'occasion" qu'elle lui offre en permanence.
Comme elle joue un bouc-émissaire, elle peut se permettre d'être en roue-libre perpétuelle, et sans beaucoup de fond psychologique. La scène où elle essaye d'émouvoir sa rivale en lui pardonnant marche mal.
Mais cette impression de vacuïté est peut-être plutôt lié au regard des réalisateurs et à ce qu'elle représentait érotiquement pour eux qu'à ses qualités d'actrice. Elle représente certainement quelque chose d'important et positif, un type de féminité rendu possible à partir des années 50, l'excentricité et l'exhubérance théâtrale jadis réservé aux grandes bouregoises enfin permises à une femme de la classe moyenne.

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