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 Sujet du message: Toni Erdmann (Maren Ade, 2016)
MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:00 
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Quand Ines, femme d’affaire d’une grande société allemande basée à Bucarest, voit son père débarquer sans prévenir, elle ne cache pas son exaspération. Sa vie parfaitement organisée ne souffre pas le moindre désordre mais lorsque son père lui pose la question « es-tu heureuse? », son incapacité à répondre est le début d'un bouleversement profond. Ce père encombrant et dont elle a honte fait tout pour l'aider à retrouver un sens à sa vie en s’inventant un personnage : le facétieux Toni Erdmann…

Toujours un peu délicat de découvrir un film auréolé d’une espèce de consensus critique absolu (à part George Miller tout le monde semble adorer le film, pas lu une ligne négative dessus). Et au final j’ai bien aimé mais j’ai pas non plus été renversé.

Ce que je trouve très fort c’est comment le film, sous couvert d’une comédie dramatique au pitch finalement assez « gentillet » (on imagine sans mal le remake US avec feu Robin Williams), n’est en fait qu’une longue et implacable plongée dans les méandres d’un état dépressif total. Rarement vu un film où le rire était aussi jaune (en accord avec la dentition du personnage principal féminin) et où tout sentait le malaise total. L’impression que chaque envolée de rire et de légèreté n’est que l’expression d’une certaine médiocrité superficielle. Ainsi le beau message du père, qui prétend dérider sa fille avec l’humour, n’est finalement qu’une succession de gags beaufs, souvent gênants et où finalement, poussée trop loin, la blague n’est plus du tout drôle mais devient presque malaisante (toute la partie Toni Erdmann en fait) en plus d'être profondément triste. A l’image du climax du film où enfin, Inès, se lâche, se remet à vivre
et décide de recevoir les gens à poil chez elle.
Cette scène, drôle au demeurant par son incongruité, est pourtant une nouvelle fois un sommet de malaise, un ratage cuisant, une tentative de libération totalement foirée. Cela culmine finalement par l’irruption du père, totalement déguisé, privé de visage et qui, uniquement sous cette forme, donc « incomplet » aura droit à un câlin, a un vrai moment de chaleur humaine.

C’est vraiment ce qui m’a semblé le plus passionnant dans ce film, pas du tout ce que j’ai pu lire ici ou là, « une histoire universelle d’amour entre un père et sa fille où on se réapprend à vivre » mais au contraire, la tristesse absolue d’un amour filial aride qui ne parvient plus à s’épanouir, qui est trop brutalement parasité par le reste (toute l’artificialité du monde professionnel d’Inès et de sa vie dissolue). Le père et la fille n’arrivent à parler presque qu’à travers le déguisement, le truchement d’un intermédiaire (la blague initiale de Winfried sur la fille de substitution devient douloureusement vraie dans son cas, il devient un autre père). Tout cela se retrouve synthétisé dans un dernier plan absolument glaçant et, pour le coup, magnifique où
la fille se déguise et, dans un geste symbolique, porte les fausses dents du père (dans une espèce de transmission, d’héritage) mais se retrouve seule, isolée, perdue et comprend que tout ça n’a aucun sens. Elle enlève ce déguisement et soudainement sa nudité vraie est là devant nous, et elle est froide comme un cadavre.
Le film se coupe là comme une constatation nihiliste presque désespérée. Je trouve ça follement osé de finir ainsi, de nous dire après 2h42 que rien n’a eu de sens, que la vie est toujours aussi obscurément insensée qu’au début. Je sais pas comment va Maren Ade mais j’ai vraiment eu l’impression que c’était un grand film dépressif, je vois mal comment on peut faire quelque chose d'aussi radicalement noir sinon.

Bref, film fascinant, beaucoup plus complexe que sa surface de comédie dramatique un peu simplette et qui m’a laissé un goût bien âcre dans la bouche. Je regrette que le film soit trop long, trop étiré dans ses intentions et au final je regrette ce manque général d’émotions. Cette froideur que ressentent les personnages, cette distance qui les tient éloignés traverse un peu l’écran et contamine le public, c’est dommage.

4.5/6

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Dernière édition par Art Core le 08 Juil 2016, 11:05, édité 3 fois.

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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:09 
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Successful superfucker
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Art Core alias le mec qui teste ta résistance au spoiler en racontant la fin du film dans tous les avis qu'il laisse.


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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:15 
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Marrant j'avais pas remarqué ça. Les fins sont souvent l'occasion de comprendre tout le film. Là en l’occurrence j'ai eu le sentiment que ça expliquait pas mal de choses.

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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:20 
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Successful superfucker
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Art Core a écrit:
Marrant j'avais pas remarqué ça. Les fins sont souvent l'occasion de comprendre tout le film. Là en l’occurrence j'ai eu le sentiment que ça expliquait pas mal de choses.


+ Grave, Divines pour ne citer que les derniers jours....

Bon et si tu ouvrais le reste de tes topics cannois? Mendoza, Mungiu, Dolan, Jarmusch, le truc afghan que j'ai oublié une semaine après, le Jodorowsky pour lequel tu t'es enfui comme une vierge effarouchée avant le débat (qui était pourtant mieux que le film)...


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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:23 
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:oops: t'étais là ? J'adore Jodorowsky l'artiste mais le personnage avec ses aphorismes à deux balles me gave vite (le coup du genou/"je nous" en intro...).
Oui faudrait que je me motive pour ouvrir les topics.

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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:26 
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Successful superfucker
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Art Core a écrit:
(le coup du genou/"je nous" en intro...).


Où on découvre que Jodo n'est en fait qu'un grand fan de Maïwenn.

Et si tu n'étais pas parti, tu aurais appris que ce n'était que le second film de son autobio et qu'il en restait trois autres à venir.


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MessagePosté: 09 Juin 2016, 15:37 
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Dommage, le mec gâche son talent (mais vu son âge, la difficulté de monter ses projets, je doute qu'il arrive à en faire encore 3).

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MessagePosté: 09 Juin 2016, 21:06 
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Antichrist
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Le film surprise de l'année, à la fois drôle, intelligent, divinement écrit. La dernière demi-heure accomplit le miracle du cinéma: faire rire, ressentir, pleurer, interroger. Je ne comprends pas son absence du palmarès, au moins pour l'acteur principal.

5/6


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MessagePosté: 09 Juin 2016, 22:51 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Pour la petite histoire, c'est Miller himself qui a mis son veto, il a totalement détesté le film.

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MessagePosté: 10 Juin 2016, 06:40 
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Assez d'accord sur le côté dépressif du film malgré les rires et applaudissements lors des projections cannoises qui me semblaient excessifs, même si c'était beau de voir une telle communion devant un tel film. On est dans un ton grinçant, parfois malaisant mais ce n'est pas une comédie.
Même si je ne suis pas aussi pessimiste que toi sur le dernier plan, amer mais pas nihiliste. Une prise de conscience a quand même eu lieu. Mais il faudrait sûrement que je le revoie.

PS : George Miller est un con.


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MessagePosté: 10 Juin 2016, 11:29 
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Prout Man a écrit:
PS : George Miller est un con.


C'est un vrai résistant.


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MessagePosté: 11 Juin 2016, 10:55 
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Toni Erdmann n’a pas le pitch le plus intéressant de la Terre, bien au contraire. Un père qui rend visite à l’improviste à sa fille pour lui redonner le sourire, elle qui semble ne jamais s’arrêter de travailler. Mais Maren Ade a un talent hors du commun, hors norme. C'est un bijou d'écriture qui n'ennuie jamais sur près de 3h. Toni Erdmann est le vrai premier choc émotionnel de ce festival de Cannes. Une ode à la vie et à l’amour. L’amour que porte un père à sa fille. Une fille gêné par le ridicule de son père. Mais dont l’humour lourd va rapidement se transformé en un humour chargé de tendresse, de compassion et de soulagement. Dans le paysage cinématographique actuel, Toni Erdmann est une bouffée d’air frais. Entre frissons et éclats de rires physiques, le film de la jeune cinéaste allemande est libérateur. L’écriture, la réalisation, le jeu des acteurs tout est fantastique. Plusieurs scènes sont déjà des futures légendes vivantes de la comédie. Cet anniversaire fêté dans le plus simple appareil. La séquence "petit four". Peter Simonischek et Sandra Huller, forment un « couple » père-fille absolument excellents. Un film jouissif, qui libère l’esprit et donne envie de vivre (pas du tout eu le même ressenti que Art Core justement). Délicate comédie s'opposant férocement au sérieux exigé par le système actuel.
Favori incontestable pour la Palme d’Or ou à un prix majeur à ce stade la compétition!

5,5/6


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MessagePosté: 11 Juin 2016, 11:16 
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Oui là on a vraiment pas du tout vu le même film. Je vois absolument pas en quoi ce film donnerait envie de vivre. J'y vois précisément l'inverse.
La démission de la fille pour recommencer la même chose ailleurs, encore plus loin du père. Preuve que rien n'a changé finalement. Qu'il suffit pas de se déguiser et de mettre des fausses dents pour modifier sa vie en profondeur.


Ces interprétations contradictoires sont sans doute ce qui fait sa richesse.

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MessagePosté: 28 Juin 2016, 17:16 
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Dans le genre film qui overstay its welcome, ça se pose là.

La mise en place est sympa mais m'apparaît presque superflue en fin de compte (le film pourrait commencer quand Toni débarque) ou du moins trop longue, comme globalement tout le film.

Voilà ce qui se passe quand on filme la V1 de son script (le récit erre sévèrement dans le deuxième acte, avec des scènes comme la visite du chantier là notamment) et qu'on coupe rien au montage (combien de scènes inutilement exhaustives sur le taf d'Ines?).
C'est interminable et ça part dans tous les sens.

C'est dommage parce qu'il y a des scènes plutôt originales, amusantes ou touchantes (tout le climax de la fête d'anniversaire est parfait) mais perdues dans un marasme de 2h42.

C'est blockbusterien comme indécence dans la durée.

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MessagePosté: 28 Juin 2016, 17:18 
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J'avoue. Etonné d'ailleurs qu'il y ait aussi peu de reproches sur la durée du film. Effectivement la scène du chantier est totalement inutile.

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