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MessagePosté: 13 Jan 2013, 01:08 
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C'est la première fois que je suis soufflé par un film d'Anderson, et surtout la première fois que je ne pense pas à un autre cinéaste en voyant l'un de ses films. C'est ultra précis sans chercher à être imposant dans son genre ni à être écrasé par ses intentions et références. Même l'aspect reconstitution et d'époque n'en fait jamais des caisses, alors qu'il y a ces plans séquences toujours très élaborés. Mais là pour la première fois, j'ai eu le sentiment que le cinéaste me créait non pas des tours de force mais des images à part entière : la baston pendant la séance photo, la femme sur la plage, ce bateau en fête...

Il y a un vampirisme à l’œuvre là dedans chez les personnages qui est vraiment subjuguant et qui semble toujours à la limite de l'improvisation dans la rencontre entre ces deux protagonistes, un lien fragile qui ne peut s'en tenir à une démonstration sur l'endoctrinement. L'un et l'autre se rencontrent par pur hasard, deux univers totalement distinct qui se rejoignent mentalement, mais à peine, juste l'espace d'un partage entrevue... Le "maître" en fin de compte dans son obstination sur Freddie, qui est le caillou dans sa chaussure pour ses proches et le système qu'il élabore, est peut-être tout autant sous emprise que sa prétendue "victime".

En même temps on n'entre jamais dans les différents points de vue, le spectateur est à l'extérieur de cette relation de domination / rebellion contradictoire chez ces deux personnages qui s'opposent différemment à leur manière au reste du monde. Et tout le film nous plonge dans cette marge, une vie de somnambule violent qui croise celle d'un prophète dont on ne sait jamais vraiment jusqu'où il s'est autopersuadé (la séquence de la convention à Phoenix est ultra sinistre). Le fils qui dit que son père improvise tout est peut-être à l'image du film parfois dans son fonctionnement, le portrait de sa relation.
Bref, des trucs comme la première séance "vérité" entre Hoffman et Phoenix c'est sans doute l'un des moments les plus forts que j'ai vu dans un film américain depuis un bon moment. Et pour parler hypnose, la scène des couleurs de yeux d'Amys Adams est assez géniale :)
Un film qui m'échappe encore par bien des aspects mais j'ai déjà très envie de le revoir.


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MessagePosté: 13 Jan 2013, 01:29 
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Mr Chow a écrit:
C'est la première fois que je suis soufflé par un film d'Anderson, et surtout la première fois que je ne pense pas à un autre cinéaste en voyant l'un de ses films. C'est ultra précis sans chercher à être imposant dans son genre ni à être écrasé par ses intentions et références. Même l'aspect reconstitution et d'époque n'en fait jamais des caisses, alors qu'il y a ces plans séquences toujours très élaborés. Mais là pour la première fois, j'ai eu le sentiment que le cinéaste me créait non pas des tours de force mais des images à part entière : la baston pendant la séance photo, la femme sur la plage, ce bateau en fête...

Il y a un vampirisme à l’œuvre là dedans chez les personnages qui est vraiment subjuguant et qui semble toujours à la limite de l'improvisation dans la rencontre entre ces deux protagonistes, un lien fragile qui ne peut s'en tenir à une démonstration sur l'endoctrinement. L'un et l'autre se rencontrent par pur hasard, deux univers totalement distinct qui se rejoignent mentalement, mais à peine, juste l'espace d'un partage entrevue... Le "maître" en fin de compte dans son obstination sur Freddie, qui est le caillou dans sa chaussure pour ses proches et le système qu'il élabore, est peut-être tout autant sous emprise que sa prétendue "victime".

En même temps on n'entre jamais dans les différents points de vue, le spectateur est à l'extérieur de cette relation de domination / rebellion contradictoire chez ces deux personnages qui s'opposent différemment à leur manière au reste du monde. Et tout le film nous plonge dans cette marge, une vie de somnambule violent qui croise celle d'un prophète dont on ne sait jamais vraiment jusqu'où il s'est autopersuadé (la séquence de la convention à Phoenix est ultra sinistre). Le fils qui dit que son père improvise tout est peut-être à l'image du film parfois dans son fonctionnement, le portrait de sa relation.
Bref, des trucs comme la première séance "vérité" entre Hoffman et Phoenix c'est sans doute l'un des moments les plus forts que j'ai vu dans un film américain depuis un bon moment. Et pour parler hypnose, la scène des couleurs de yeux d'Amys Adams est assez géniale :)
Un film qui m'échappe encore par bien des aspects mais j'ai déjà très envie de le revoir.


Je suis assez d'accord avec ton texte. De mon côté, il s'agit du meilleur Anderson. On va laisser vieillir avant de crier au grand film mais ces dernières années j'ai rarement vu des scènes qui m'ont autant soufflés dans le cinéma américain.


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MessagePosté: 13 Jan 2013, 10:50 
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Beau texte Mr Chow, tu pointes de très belles choses en effet. Et le film me poursuit plus que je ne l'aurais imaginé.

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MessagePosté: 13 Jan 2013, 11:06 
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Je remets ici mon premier commentaire à chaud... mais il est clair que je repense beaucoup à ce film qui conserve (et conservera, j'espère) beaucoup de mystère.

The Master est un film surprenant qui possède nombre de points de raccord avec le précédent film d'Anderson : grand sujet d'arrière-plan pour récit ramassé et intimiste, forme complexe et fuyante, étrangeté rampante qui pervertit régulièrement une certaine limpidité d'ensemble...

Ce qui m'a rendu le film captivant et m'a fait l'aimer d'une façon que j'oserais décrire comme "simple" sans que ce soit rabaissant, c'est que cette singularité de ton et de forme que travaille un peu plus le réalisateur à chaque film depuis Punch-Drunk Love, avec ses sautes d'humeur, ses interdits brisés, ses expérimentations de jeu en contrastes et dissonances, telles une répétition magique qu'on aurait enregistrée... bref, tout ce dispositif que d'aucuns accuseront de prétentieux, calculateur ou voué à détourner d'une éventuelle vacuité de propos, Paul Thomas Anderson l'harmonise ici, dédramatise, éclaircit sa palette et la met au service d'une "simple" histoire d'amour contrariée dans un cadre pour le moins "théâtrale" (La Cause).

Le récit à la première personne d'un paumé, électron libre dont la dérive sociale et affective le mènera par un enchaînement fait de hasards, de collusions puis d'intérêts individuels, à reprendre le contrôle sur l'autre et surtout sur lui-même. A devenir son propre maître.
Le film devient alors une sorte de fable tragi-comique évoquant un malheureux jeu d'emprise affectif et moral à deux faces qui se délite, se renverse pour finalement se tourner en dérision (la dernière séquence, équivoque, jouant avec l'image d'une initiation qui se perpetue...)

The Master est ainsi un film qui prend son titre au pied de la lettre en parlant moins de contrôle sur l'autre que sur soi-même, PAR l'autre (l'appaisement par le souvenir de Freddie Quell, qui trouve d'ailleurs une belle ouverture juste avant son dernier face à face avec Lancaster Dodd).
La mise en scène du film est donc naturellement à rapprocher de son personnage pivot : imprévisible, un peu monstrueuse mais souveraine et définitivement singulière. Elle est l'expression permanente d'une liberté rare, inssaisissable, qui joue avec la folie, la chatouille et y puise une énergie créatrice, audacieuse et vivifiante.
Je n'omettrai pas la prestation habitée de Phoenix (ni celle, parfaite, de Hoffman) qui, selon moi, fait corps avec le film et sa beauté comme Adam Sandler et Daniel Day Lewis avant lui.


5/6


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MessagePosté: 13 Jan 2013, 11:24 
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Mr Chow a écrit:
Et pour parler hypnose, la scène des couleurs de yeux d'Amys Adams est assez géniale :)

Excellent en effet, même si c'est méga-court... Ton texte redonne envie de le voir.


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MessagePosté: 13 Jan 2013, 22:35 
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Magnolia 3,5/6
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There Will Be Blood 4,5/6

J'avais vraiment envie d'aimer. Vraiment.
Le sujet, le casting, les bandes-annonces...tout m'attirait, même si je ne suis pas particulièrement fan du cinéaste, j'étais prêt à y croire cette fois-ci.

J'ai trouvé ça globalement raté.

C'est même pas tant que j'ai trouvé ça hermétique ou partculièrement froid, même si ça l'est de facto, c'est juste qu'il m'a paru qu'Anderson passait complètement à côté de son sujet, qu'il s'agisse du portrait en creux de la Scientologie ou de l'étude du post-traumatic stress disorder d'un vétéran de la Deuxième Guerre Mondiale, ou bien du rapport nietzschéen qui unit les deux principaux protagonistes...

La faute à une narration qui m'a semblé assez décousue, enquillant les scènes un peu basiquement au début, réduisant l'exposition et la caractérisation à l'essentiel mais en freinant également toute implication, tout approfondissement. Même le premier face-à-face, je le trouve trop "facile". J'ai souvent eu l'impression que chaque tournant du récit, chaque rebondissement dans la relation entre le gourou et son disciple était pas "mérité", qu'il n'avait pas été "gagné" par le scénario.
En fait, j'ai fréquemment eu l'impression de ne pas voir le vrai film mais une compilation de scènes coupées du vrai film. Du coup, on se fait une idée du film, de quoi ça parle, tout ça, mais de manière quelque peu superficielle. Et ça m'a laissé la sensation assez bizarre de voir un film à la fois opaque et très démonstratif. Souvent redondant (les scènes où Freddie pète un câble et tabasse quelqu'un/quelque chose).

Je trouve pas ça prétentieux (je n'ai jamais trouvé que c'était le cas dans la filmo de PTA) mais je trouve ça foireux.
C'est l'éternel risque de la structure qui adopte l'esprit du protagoniste. Là ça marche pas. Ca m'a rappelé Punchdrunk Love.
Si la réa est moins ostentatoire que dans les précédents, je la trouve toutefois d'une grande maîtrise, claustro et fantasque.
Phoenix est bon, même si la performance est parfois trop voyante. Hoffman est parfait. Adams, par contre, je comprends pas les louanges. Elle est bien mais sans plus, son perso étant assez sous-traité.

2-3/6

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MessagePosté: 13 Jan 2013, 22:40 
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Tom a écrit:
L'interview des Cahiers laisse entendre que c'est un scénario "complet" dont on peu à peu retiré les scènes, notamment les plus fonctionnelles.

Ah bah bim, j'ai tapé juste.

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MessagePosté: 14 Jan 2013, 00:17 
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En sortant de la salle avec puck, je savais pas trop quoi en penser. Avec du recul, je pense que je n'arrive à comprendre le film qu'en le replaçant dans la filmo de Anderson. Le mec est clairement intéressé par la figure de l'orateur/mentor un brin malsain. Cruise dans magnolia, le prospecteur face aux villageois dans twbb, et reynolds dans boogie nights, tous font vraiment penser à des fragments de the master. Et j'ai l'impression qu'on a coupe du film tout ce qui n'était pas dans le trip gourou évangélisateur. Au final ça donne un truc assez bancal, mais intéressant. Le plus troublant c'est qu'on ne saisit jamais vraiment le personnage de Hoffman, on ne sait jamais à quel point il croit aux conneries qu'il débite, le pire étant sa dernière scène. La réponse doit être quelque part entre les deux. Mais il y a cette scène qui m'a vraiment marqué à Phoenix, le bref dialogue avec Laura dern. Seul moment ou j'ai l'impression que le mec se révèle pour de bon, très très brièvement. Et le truc fait très mal.

Je saurais pas le noter. Je pense qu'en l'état c'est très perfectible. Trop opaque, mais vraiment intéressant.


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MessagePosté: 14 Jan 2013, 12:44 
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Film Freak a écrit:
Tom a écrit:
L'interview des Cahiers laisse entendre que c'est un scénario "complet" dont on peu à peu retiré les scènes, notamment les plus fonctionnelles.

Ah bah bim, j'ai tapé juste.

Oui, c'est effectivement quelque chose de très sensible pendant le visionnage... et pourtant, par je ne sais quelle magie, j'ai l'impression que la mise en scène amène à combler les vides et à trouver la fascination du spectateur dans ses esquisses pas développées. C'est curieux mais personnellement je ne fais que repenser au film depuis deux jours, ce qui me fait dire que le parfum se diffuse quand même... à voir avec le temps.


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MessagePosté: 15 Jan 2013, 01:31 
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Je vous trouve pour la plupart très durs et quelque peu chichiteux. En ce qui me concerne, après récemment tant de films intéressants mais pas non plus "grands", comme on dit, j'ai compris dès les premières minutes qu'on tenait là l’œuvre d'un cinéaste monstrueux, bien au-dessus du lot, d'une maîtrise, d'une magnificence, et pourtant aussi d'une sobriété et d'une épure dans le geste, sublimes. Il n'y a qu'à voir la fuite de Phoenix poursuivi pour empoisonnement, qui a en ligne de mire ce rectangle de lumière, et qui y entre tout à coup pour déboucher dans la plaine, nous donnant à voir l'un des travellings latéraux les plus échevelés et les plus doux à la fois du cinéma, et cet enchaînement en fondu sur les lumières floues du bateau du Maître. Un processus esthétique qui trouvera son écho inversé dans la scène de la moto dans le désert, avec ce nouveau travelling, et ce nouveau flou, cette fois-ci sur la silhouette du fuyard. Tout est là: Phoenix fuit sa folie pour se réfugier dans les bras d'un maître avec qui il va nourrir une relation ambiguë, pour ensuite finir par la fuir à son tour par un nouveau travelling échevelé et renoncer à la guérison - c'est ainsi qu'il faut comprendre la dernière scène: il transpose le modèle de domination appris auprès du maître dans le cadre de la relation sexuelle, achevant ainsi son cheminement terrifiant mais logique, ne suivant plus que sa propre "lumière floue".

Le film fait aussi fort dans son éclatement et dans le systématisme avec lequel il avorte l'intensité des scènes, leur début et leur fin. Cela permet dans un premier temps de fausser les repères sur la vraie nature de la relation entre les deux protagonistes: d'amitié, de maître à esclave, homosexuelle? Anderson nous montre que ce genre de relation est constamment mouvante, exemplifiant notamment la dialectique de ce cher Hegel. Le dernier face à face montre cependant que du début (le maître n'est pas dupe, il parle d'une vie antérieure pour leur première rencontre, mais évidemment qu'il fait référence à cette baston dans le centre commercial) à la fin, leur relation a toujours été sous-tendue par une rivalité essentiellement animale - la même animalité que le gourou dit vouloir dépasser. "Dans notre prochaine vie, nous serons ennemis et je serai sans merci". C'est dit avec une telle férocité, à peine voilée par la froide affection de l'échange, qu'on ne peut réprimer un frisson en voyant incarnée en un instant l'une des facettes de l'homme la plus spontanée et la plus cruelle: la volonté de domination.

Mais le film ne tombe pas dans le complet pessimisme puisqu'il semble aussi dire qu'une autre tendance humaine est aussi la recherche de l'affection, de la familiarité, la poursuite de ses idéaux, en l'occurrence la jeune vierge de 16 ans. Et il ne tombe pas non plus dans la métaphysique trop ambitieuse et vide de sens. Comme dans There Will Be Blood, on assiste à la description du mécanisme et des systèmes de domination appliqués à une société, les Etats-Unis, et une époque, ici l'après-guerre. Non pas qu'Anderson, dans ces deux films, ne dresse pas de parallèle, ne met jamais en valeur une permanence dans la nature humaine, mais ça reste circonscrit et finalement plutôt humble.

Et puis avec cette poétique qui naît de l'éclatement, du fractionnement, des coupes opérées un peu partout qui en plus de symboliser la relation des deux hommes font du film cet objet étrange et insaisissable, mystérieux, protéiforme, qui créé une ambiance pour passer abruptement à une autre avant de revenir à la première, qui n'explique pas tout, ne déroule pas toute la pelote. Film Freak parle d'un film raté parce qu'il n'a pas su à mon avis apprécier le fantasme qui naît de ces failles, cette possibilité au cinéma - dont je crois parlais Michel Chion dans son livre sur Kubrick - de faire dans le dissymétrique, la coupe brutale de plusieurs scènes effectivement fonctionnelles, pour retrouver la vraie logique cachée des enchaînements de l'existence. On s'en fout qu'à un moment les personnages aient pris leur voiture pour aller dans le désert, ou se soient d'abord déguisés en cow-boy à la recherche d'un livre enfoui là exprès dans une mise en scène de secte. Ce qui compte, c'est que nous spectateurs sommes directement propulsés là, avec ces personnages et l'étrangeté de leur situation, transposée en plusieurs formes: dans le désert, entre les murs et l'audience oppressante de la secte, dans un salon bourgeois, dans l'arrière boutique d'un centre de congrès de Phoenix où se rumine un énième discours de persuasion, etc. Tiens ça me revient, cette épure, Michel Chion en dit que Kubrick avait bien compris sa nécessité, multipliant les coupes avec des montages successifs pour enserrer toujours plus près le cœur de son point de vue, dans ce qui passait à l'époque pour du sabotage de chef-d’œuvre. Les films s'appelaient 2001, Eyes Wide Shut...


Dernière édition par Baptiste le 15 Jan 2013, 01:47, édité 1 fois.

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MessagePosté: 15 Jan 2013, 01:44 
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Baptiste a écrit:
Film Freak parle d'un film raté parce qu'il n'a pas su à mon avis apprécier le fantasme qui naît de ces failles, cette possibilité au cinéma - dont je crois parlais Michel Chion dans son livre sur Kubrick - de faire dans le dissymétrique, la coupe brutale de plusieurs scènes effectivement fonctionnelles, pour retrouver la vraie logique cachée des enchaînements de l'existence. On s'en fout qu'à un moment les personnages aient pris leur voiture pour aller dans le désert, ou se soient d'abord déguisés en cow-boy à la recherche d'un livre enfoui là exprès dans une de mise en scène de secte.

Attention, là tu te méprends totalement. Tu cites des exemples de scènes qui sont typiquement celles qui se trouvent dans les ellipses, et c'est le cas de n'importe quel film lambda. J'ai pas dit que j'avais l'impression que les scènes existantes étaient tronquées, j'ai dit que j'avais l'impression de voir les scènes qui auraient dû être coupées, plutôt que celles qui auraient dû être gardées, à quelques exceptions près.
J'ai eu l'impression de voir des scènes qui, dans un autre film, auraient été celles qui étayaient le propos établi dans les "vraies" scènes "importantes" (si je puis dire). Sauf qu'ici, on a viré toutes les scènes-clé pour ne garder que ce qu'il y avait autour. Ca donne donc une idée de ce que ça raconte mais ça le raconte mal, de manière inintéressante, qui n'engage pas le spectateur.

Citation:
Tiens ça me revient, cette épure, Michel Chion en dit que Kubrick avait bien compris sa nécessité, multipliant les coupes avec des montages successifs pour enserrer toujours plus près le cœur de son point de vue, dans ce qui passait à l'époque pour du sabotage de chef-d’œuvre. Les films s'appelaient 2001, Eyes Wide Shut...

Oui, au diable la mesure... :mrgreen:

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MessagePosté: 15 Jan 2013, 01:55 
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Citation:
Oui, au diable la mesure...


Bah oui précisément, on n'est pas là pour prendre un mètre. Je ne sais pas vraiment l'ampleur de ce que sera The Master pour la postérité, peut-être sera-ce juste un des films intéressants sans plus auxquels je faisais allusion, et c'est pourquoi je ne mets pas de note pour l'instant. Mais j'ai au moins le sentiment qu'on tient là quelque chose de très singulier.

Pour le reste, pas du tout d'accord. Chaque scène est primordiale et c'est pas parce que ce n'est pas "iconique" comme tu aimes -oui, ce mot revient souvent dans tes critiques- que ce n'est pas signifiant. Au demeurant, ton jugement selon lequel Anderson se serait gourré sur toute la ligne dans chacun de ses choix sur ce qu'il faut montrer et ne pas montrer n'est pas très convaincant, dans la mesure où c'est un systématisme créé par Anderson: il faut qu'il y ait une intention un peu autre, qui visiblement t'aurait échappée. Ou ne t'aurait pas intéressé, ce que je conçois, évidemment: c'est un film étrange.


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MessagePosté: 15 Jan 2013, 02:11 
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Baptiste a écrit:
Citation:
Oui, au diable la mesure...


Bah oui précisément, on n'est pas là pour prendre un mètre. Je ne sais pas vraiment l'ampleur de ce que sera The Master pour la postérité, peut-être sera-ce juste un des films intéressants sans plus auxquels je faisais allusion, et c'est pourquoi je ne mets pas de note pour l'instant. Mais j'ai au moins le sentiment qu'on tient là quelque chose de très singulier.

Pour le reste, pas du tout d'accord. Chaque scène est primordiale et c'est pas parce que ce n'est pas "iconique" comme tu aimes -oui, ce mot revient souvent dans tes critiques- que ce n'est pas signifiant. Au demeurant, ton jugement selon lequel Anderson se serait gourré sur toute la ligne dans chacun de ses choix sur ce qu'il faut montrer et ne pas montrer n'est pas très convaincant, dans la mesure où c'est un systématisme créé par Anderson: il faut qu'il y ait une intention un peu autre, qui visiblement t'aurait échappée. Ou ne t'aurait pas intéressé, ce que je conçois, évidemment: c'est un film étrange.

C'est plutôt ça, parce que je "vois" ce que chaque scène cherche à faire, en gros, mais je trouve ça faible/raté.

Encore une fois, je saisis les sujets qu'aborde le film mais je ne trouve pas le traitement de ces sujets compelling (pas besoin que ce soit "iconique" hein).

Et mon jugement n'a pas à "convaincre" de quoi que ce soit d'autre que de mon ressenti...si un avis devait forcément convaincre les autres, le tien échoue aussi.

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MessagePosté: 20 Jan 2013, 17:56 
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Ce sera sans doute l'un des plus beaux films de l'année : la photo et la mise en scène sont toujours inspirées, ça transpire la classe et l'intelligence à chaque plan.
Mais je me suis ennuyé très rapidement : les dialogues sont parasités par le verbiage sectaire creux, Phoenix surjoue quand même assez atrocement (au bout d'une demi-heure il s'est tordu la bouche 300 fois et mis les mains sur les hanches 150) et on (je) décroche doucement, malgré les quelques clashs. En fin de compte je ne comprend pas vraiment ce que le film me raconte, et le peu que j'en comprends ne m'intéresse pas plus que ça. Je ne trouve pas le lien maitre/disciple très bien exploité (de toute façon on comprend vite que quelqu'un d'autre tire les ficelles), je ne trouve pas le discours sur la secte ou sur la psychanalyse de foire bien passionnant, je ne trouve pas le côté "tout est vu à travers les yeux de Freddy" bien rendu non plus, et je ne trouve pas que le réal aime assez ses personnages pour susciter mon intérêt (ce sont quand même tous de sales gros cons, et ils n'évoluent pas beaucoup à travers les quatre ou cinq heures que semble durer le film). Voilà, il m'en reste juste une maestria de cinéaste, Seymour Hoffman et Amy Adams.
3/6


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MessagePosté: 20 Jan 2013, 18:22 
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Antichrist
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Assez d'accord sur Phoenix que je trouve horripilant dans ce film.


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