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MessagePosté: 04 Sep 2019, 09:14 
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Mickey Willis a écrit:
Art Core a écrit:
Ce personnage, perclus de doutes, qui lit Lévinas et qui se console dans la religion est totalement abandonné très rapidement comme si toute cette introduction n'avait servie à rien. Il faut dire qu'il est incarné par Antoine Reinartz totalement miscast, pas crédible une demie seconde donc peut-être que son rôle a été raboté au montage.


C'est marrant je voulais justement évoquer ça, mais dans le sens inverse: le fait qu'un personnage clairement introduit comme le personnage principal au début du film, en tous cas celui à travers lequel on pense que l'on va nous raconter l'histoire, se fait rapidement mettre au second plan par un Roschdy Zem impérial qui comme son personnage prend le devant de la scène, de la même manière qu'il prend l'affaire en main. C'est le boss. Je ne sais pas à quel point c'est voulu mais je me plais davantage à croire que c'est volontaire, et je trouve ça assez géniale l'idée de ce glissement, ça justifie pour moi les hésitations du début du film, ces routes qui s'ouvrent sans être tout à fait empruntées. ça renforce l'idée que l'histoire se déroule devant nous, comme si personne n'était réellement maître de ce qui allait se passer.


Pareil, le grand personnage c'est celui de Roschdy Zem, la preuve que l'on peut arriver à quelque chose dans tout ce fatras (d'où le "Une lumière" du titre). Le personnage de Reinartz est un peu bancal mais il est possible que Desplechin ait voulu signifier que la foi ne corresponde pas forcément à la certitude, la confiance.

Citation:
Et comme toi, j'ai eu du mal avec l'hystérie qui entoure les scènes d'interrogatoire, où ça gueule dans tous les sens. Je me suis demandé pourquoi car ça ne semblait pas du tout naturel (à part le gros bonhomme flic, ça passe plutôt bien avec lui, mais la meuf avec Reinartz par exemple ça va pas du tout) mais peut-être tout bêtement car le cinéma ne représente pas ce type de scène de cette façon en général, et que c'est lui qui déforme la réalité finalement ?


C'est très, très probablement voulu, Desplechin a beau s'attaquer au film policier pour la première fois, il n'en ignore pas les codes. Policiers comme témoins et mis en cause, personne n'est en contrôle face à la misère sociale et intellectuelle.


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MessagePosté: 04 Sep 2019, 09:17 
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D'ailleurs je savais pas du tout que le film était en fait une fiction basée sur un documentaire qui relate la même historie (et que j'ai très envie de voir du coup) : https://www.telerama.fr/cinema/a-lorigi ... 352083.php

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MessagePosté: 04 Sep 2019, 09:19 
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En tout cas moi j'ai eu une séance troublante, je me suis légèrement ennuyé à certains moments, on dirait un film malade comme on dit, avec beaucoup de sinuosités qui paraissent inutiles, mal maîtrisées par l'auteur mais qui avec du recul composent une ambiance délétère dont, une semaine après, je reste imprégné.

Et il y a un de ces "moments de cinéma" dont parlait Positif dans son numéro d'été, quand les deux protagonistes féminines se regardent à travers le grillage du fourgon de police, cette résignation dans l'amour, c'est juste magnifique, sur fond de musique inspirée du Tristan et Isolde de Wagner (pas crédité! mais j'en suis sûr): j'ai chialé d'un coup, je l'ai pas vu venir.


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MessagePosté: 08 Sep 2019, 21:11 
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Le logo de police éclairé dans la brume nocturne comme une guirlande suicidaire dans un film de Beinex, sur fond de chien (de loup ?) hurlant à la mort pendant un travelling vertical, le commissariat central décoré des plans de ville psychédéliques du mobilier urbain que l'on trouvait dans la métropole lors des années 80 (que Desplechin à dû dénicher à la braderie), laissaient craindre le pire. Heureusement le film se reprend, et ne manque pas de profondeur psychologique, grâce aux numéros d'acteur (ils sont tous très bons, mais j'ai particulièrement été impressionné par Sara Forestier, méconnaissable) qui défendent tous les personnages avec un investissement authentique. Bizarrement au vu du parcours de Desplechin, le film fait plutôt penser à Clouzot, enfin à de la Qualité Française (un peu comme Primal Scream faisant des albums des Rolling Stones dans les années 90) qu'à la Nouvelle Vague ou à Resnais (c'est le premier film de Desplechin sans musique pop contemporaine diégétique).
On retrouve quand-même des traits caractéristiques de sa vision du monde : comme toujours chez lui les personnages ne sont typés qu'au seul point de vue moral, et se répartissent les positions existentielles (et paradoxalement d'autant plus que le film se veut sociologiquement ancré, car ce partage sans recoupement est une condition de la communauté), sauf peut-être par l'immigration, qui est une dimension placée en fait à mi-chemin du moral et du social. Avec le personnage de Reinartz (qui joue en fait un curé bernanosien, mais cela sert le personnage), le catholicisme est tout autant surdeterminé que ne l'était le judaïsme dans ses films précédents, comme si la question des origines étaient intégralement convertie en celle du salut.

Sinon le film fait un carton dans la région de Lille : salle pleine, famille - très deplechinesque d'ailleurs avec un patriarche visiblement professeur- qui en parlait dans le train entre Courtai et Lille (appelant la partie bourgeoise de Roubaix "Barbieux" avec le dénigrement des petites différences freudiennes)..

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MessagePosté: 09 Sep 2019, 08:38 
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J'ai l'impression que le film, comme le précédent, a été raccourci par rapport à celui montré à Cannes. Le critique des Cahiers (très négative, pas fausse, mais ils ont finalement le même discours sur ce film que sur Tarantino, ce qui pose problème : ils ont longtemps appelé chez Tarantino le classicisme qu'ils dénigrent à présent, et le Desplechin n'est pas tout à fait un Barnaby non plus) mentionne une scène où Reinartz (que j'ai trouvé plutôt bon) explique sa vocation religieuse et un passé de séminariste, qui n'est pas dans le film (on le voit juste effondré sur le sol d'une église, et lisant une lettre qu'il écrit à quelqu'un dont on ignore le ton mais pourrait être un professeur voire un curé).

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MessagePosté: 09 Sep 2019, 11:16 
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Art Core a écrit:
D'ailleurs je savais pas du tout que le film était en fait une fiction basée sur un documentaire qui relate la même historie (et que j'ai très envie de voir du coup) : https://www.telerama.fr/cinema/a-lorigi ... 352083.php


J'ai cherché partout, sur des sites légaux/illégaux, il n'est nulle part. Pas de DVD non plus.


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MessagePosté: 09 Sep 2019, 11:29 
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Des gens sur Twitter semblent l'avoir vu mais je ne sais pas où ils l'ont trouvé.

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MessagePosté: 12 Sep 2019, 23:29 
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J'avais envie de le voir mais maintenant il va falloir attendre la sortie VOD.
Envie de le voir parce que je ne rate aucun Desplechin depuis ces débuts (même si je ne pourrais pas dire que j'adore. Mais il y a un truc qui fait que je passe au final un bon moment devant ses films, probablement ce qu'il tire des acteurs plus que l'histoire, surtout avec Mathieu Amalric).
Alors je ne le manquerai pas (même sans Mathieu Amalric) mais sans m'attendre à être bouleversée non plus :)
Et il y a de très bons acteurs à l'affiche.

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Sandra - data2links.fr


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MessagePosté: 17 Sep 2019, 23:12 
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Pour info, les derniers Desplechin ne me parlent pas du tout, mais vraiment pas. C'est des films que je ne comprend pas. J'ai donc été surpris d'être plutôt séduit par ce nouvel opus, malgré des réserves. C'est peut-être le Desplechin que je préfère depuis ESTHER KAHN, peut-être depuis ROIS ET REINE.

Ce qui m'a d'emblée plu, c'est cette volonté de raconter des histoires. On sent dans le film une envie de narration, de suivre des fils, des intrigues, de faire exister un tas de protagonistes secondaires, chacun le personnage principal de son propre film. Séduit aussi par la volonté du film de créer un héros: ce Daoud magnétique, que Desplechin magnifie en le filmant presque toujours en contre-plongée - jusqu'à ce que bref plan johnfordo-chevaldeguerresque à la fin. Zem est vraiment bien dans le rôle, charismatique, fort et doux. C'est comme s'il était lui-même la "lumière" du titre, au sens intellectuel comme par la grâce qu'il dégage.

J'aime la liberté du film. Liberté dans les à-côtés qu'il s'autorise (du style le monologue de Reinartz dans sa chambre), liberté dans la construction (cette chronique qui subitement se dilate en une intrigue principale avant de se re-contracter dans les dernières minutes), liberté dans le casting. Mais ça ne va pas sans des afféteries inutiles, du style ce son de lance-flamme lorsque Bruno Lochet raconte son agression, ou un zoom avant 70s sur Zem qui entend des chats miauler... Le film ne manque pas non plus de moments qui manquent de sens, comme la sous-intrigue sur le cousin de Zem en prison qu'évoque Art Core. Également totalement désarçonné (c'est le cas de le dire) par la fin du film, incompréhensible, et ce plan final nul à chier.

Concernant le gros morceau central sur les deux filles, Sara Forestier est absolument géniale. On a vraiment pas l'impression qu'elle joue, contrairement à Seydoux. Je n'aime pas verser dans le Seydoux-bashing mais elle est tellement en dessous. Lors du montage alterné des deux interrogatoires, c'est fou le contraste diégétique et extra-diégétique entre d'un côté Daoud qui mène bien sa barque et Forestier qui joue super bien, et de l'autre Reinartz et sa bande qui font n'importe quoi face à une Léa Seydoux au jeu sec. Pas étonnant que de ces deux alumni de chez Kechiche, c'est celle que Kechiche a découvert lui-même qui soit de loin la meilleure.

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MessagePosté: 17 Sep 2019, 23:39 
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Ha moi j'aime bien son jeu. Elle fait plus bourgeoisie que Forestier mais cela sert le personnage, et lui suggère un passé que le documentaire ne lui attribue sans doute pas. Cette différence de classe sociale peut expliquer son ascendant sur Forestier qui va jusqu'à la manipulation. J'ai aimé le fait d'avoir un personnage d'un même couple joué dans un registre très naturaliste, un peu à la frère Dardenne voire à la Bresson, et quelqu'un qui verse plutôt dans le jeu froid et distancié mais dans la séduction de Stéphane Audran dans les Chabrol, à la fois complètement absente à elle-même et préméditant toute l'intrigue, indéchiffrable et consciente de ce qui transparaît de déterminisme sociologique dans ses attitudes.
C'est une belle idée que Daoud soit le seul à avoir de la compassion pour elle (ils ont la même manière de mettre en scène un passé mystérieux, la même arrogance aussi, ce qui est souffrance chez les autres est présenté une forme de destin pour eux-mêmes). Tout le personnage de Forestier réside dans le fait de tenir l'aveu de son crime pour une forme de grâce sans laquelle elle n'aurait pas d'histoire ni n d'ancrage dans le monde, ce que la conscience de son appartenance sociale interdit à Seydoux : celle-ci est déjà la préméditation d'un destin, à la fois une morale et un artifice.

Grâce à ce décalage on a en même temps l'idée d'un lien fusionnel et l'impression qu'elles ne se connaissent en fait pas du tout.
C'est accentué par le fait que Forestier est méconnaissable quand Seydoux reprend tous ses personnages passés (le bleu de son pull).

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Erving Goffman


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MessagePosté: 20 Sep 2019, 20:48 
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Art Core et QGJ ont tout dit.

J'aime bien la première moitié, l'aspect chronique, le commissaire Daoud, le portrait d'une ville... Je comprends pas non plus le plan oliverstonien en faux raccord délibéré/ralenti/vrai bruit de lance-flammes sur le témoin évoquant un lance-flammes lors d'une déposition ainsi que le zoom '70s, mais le reste est un étonnant pas vers le réel de la part de Desplechin...

...et en même temps, c'est là que le bât blesse. J'ai pas vu le documentaire original mais j'ai vu des Depardon et pour ce qui est des témoignages abracadabrantesques auxquels les flics de la vraie vie ne croient pas, la fiction ne peut rivaliser avec la réalité. Pareillement, les incursions desplechinesques très marquées dans ce récit impressionniste (les lettres du personnage de Reinartz, dont j'ai pas détesté la prestation même si elle est un peu à côté) font tache du coup. Surtout que, comme d'autres choses, ça paraît abandonné en cours de route par le récit pour se concentrer sur le couple improbable (effectivement, Forestier est convaincante là où Seydoux fait pas d'efforts, je trouve) avec des interrogations plutôt impressionnantes dans leur version franco-agressive réaliste du good cop, bad cop mais au mystère éventé tellement tôt que bah...c'est long pour rien.

La reconstitution trouve une soudaine émotion mais c'est trop peu trop tard.

Ça fait quand même deux films foutraques de suite, Nono...

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MessagePosté: 16 Mar 2021, 10:01 
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Bien aimé la façon dont se sort Desplechin de la chronique policière d'illustres ainés pour proposer quelque chose d'à part et subtilement incarné tout en rendant un hommage au boulot de flic (dans sa composante la plus pure, presque fantasmée). Boulot de flic presque exclusivement axé sur la libération de la parole et le soulagement de l'individu dans la restitution de la vérité comme dans un confessionnal ou psychanalyse. Mais en même temps j'apprécie aussi que le film ne s'enferme pas dans un dispositif trop strict ou une forme démonstrative. Certains regrettent peut être cet éparpillement dans la première partie mais j'ai pris ça comme une respiration, un truc qui lui permettait de travailler ce point de vue bienveillant sans pour autant cacher la réalité de la ville.
Le truc que dis Daoud sur la misère et la lumière en très peu de mots, ça tape juste et on le comprend intimement par le film.


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MessagePosté: 28 Jan 2022, 12:37 
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Le meurtre qui a inspiré le sujet du film a eu lieu « dans la nuit du 16 au 17 mai 2002, cour Desplechin, une courée qui donne sur la rue Franklin, en plein cœur du quartier du Pile."

On sait qu’il y a une veine d’auto fiction qui parcourt l’oeuvre de Desplechin. Là elle tient essentiellement à une proximité, un peu fantasmatique, avec les héroïnes par l’intermédiaire de la ville de Roubaix.
Il s’agit en fait d’une adaptation très littérale d’un documentaire pour la TV française, ce que Desplechin a voulu marquer en écrivant au générique que le film a été « dirigé » par ses soins. Le travail de direction, d’inoculation de la fiction dans le réel du documentaire, passe donc par la substitution de personnes réelles par des acteurs connus, une réactualisation des décors du documentaire de l’époque (qui date de 2002), qui va de pair avec une forme de montée en gamme qui extrait la réalité de sa cosse misérable et piteuse (on ne verra jamais de posters d'Assassin(s) de Kassovitz dans le film par exemple accroché au mur du commissariat, notation par trop sociologique et donc déjà éculée).
Il colmate aussi quelques brèches du documentaire avec des images qui contrebalancent une forme de platitude, d’immédiateté du documentaire : femmes en burka aux allures de fantômes, corps entr’aperçu sur une table de morgue, poubelle enflammée dans la nuit, lumière nocturne non dénuée de chaleur, Levinas, musique extradiégétique...
Si l’image peut ainsi être modulée, parfois glorifiée par la grâce de la « direction », Desplechin, dans le dossier de presse, attribue une toute autre signification aux paroles du documentaire : « j’ai voulu  considérer  ces  mots  bruts  des  victimes  et  des  coupables  comme  la  poésie  la  plus  pure  qui  soit.  Je  l’ai  regardée comme un matériel sacré, soit : un texte que nous n’en finissons pas d’interpréter. »
C’est arbitraire, mais on n’attend pas autre chose d’un metteur en scène. Le texte du documentaire est comme un script de théâtre, élevé un peu arbitrairement au rang d’évangile, donc en définitive, la question, quand on a vu le documentaire, c’est qu’est-ce qu’apporte, qu’est-ce que révèle Desplechin par son illustration, en présentant un documentaire comme une oeuvre de cinéma (ce qu’il n’est pas le seul à faire évidemment)?
Ce pourrait donner lieu à des réflexions théoriques, voire existentielles intéressantes pour qui aurait envie de s’y coller.
Forestier en fait un peu trop dans le rôle d’Annie, la direction de Desplechin a été de lui dire de plisser le front en permanence car le réalisateur a dû lui dire que ça faisait prolo, ce que ne fait moins la jeune fille qui lui sert de modèle.
Quand on a vu le documentaire, qui se faisait par définition au jour le jour, c’est marrant, car la première apparition des deux jeunes filles est particulièrement peu dramatique : une fille aux cheveux longs noués en queue de cheval sous casquette et une autre à l’allure garçonne et au physique assez ingrat. La caméra ne les met pas en valeur, pas davantage que le policier qui les interroge. Elle ne les rabaisse pas non plus : elle est plate. Desplechin est assez plat aussi, juste un tantinet dramatique, menaçant, sa manière d'inoculer le tragique dans le quotidien, la signification dans l'absurde.
Plus tard, à la fin du film, quand les choses auront pris une tournure singulièrement plus dramatique : on les redécouvrira en gros plan : la fille au beau visage et aux traits assez réguliers dont l'autre est amoureuse (ses cheveux ont un peu poussé et on accuse réception de ses grands yeux bleus apeurés). Il y en a une un peu plus maline, un peu plus belle que l’autre, ce qui lui confère une forme d'autorité, et cela donne, dans la retranscription de Desplechin, un partage des rôles où le spectateur soupçonne ou critique une origine sociale plus élevée chez le personnage de Seydoux. Voilà l’avantage que donne un niveau minimal de beauté, ou le désavantage procuré par nez un peu gros et de dents pourries (auquel donc on a ajouté un front désespérément plissé qu'elle arbore un peu dans le documentaire mais pas autant) aux yeux du spectateur, et sans doute de la justice (les deux protagonistes furent condamnées à 22 et 13 ans de prison).

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Art Core a écrit:
sponge a écrit:
P'tain, j'ai limite envie de le voir (en mode maso), pour voir comment est "représenté" Roubaix (RBX pour les intimes).


Image d'une ville du nord comme on se l'imagine, triste, grise et pauvre. Mais il y a un vrai amour de la ville par le personnage principal, il y a pas du tout de regard méprisant.


La majorité du film a lieu dans le commissariat donc ne pas s'attendre à un regard topographique. Je n'avais pas lu l'article de Télérama donc mon message est un peu redondant.


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