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MessagePosté: 10 Mar 2012, 18:38 
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Plus envie de poster dans le topic africain tout salopé, là...

Image

Diouana, une jeune Sénégalaise, suit ses patrons blancs lorsqu'ils rentrent en France. Mais sur place, écartée des enfants dont elle devait s'occuper, et devient bonne à tout faire...


C'est beaucoup plus motivant que je ne l'imaginais (n'étant pas un grand fan de Moolaadé, qui s'avère par comparaison beaucoup moins solide que ce premier long). La noire de évoque d'un côté la caricature qu'on pourrait se faire d'un cinéma politique des années 60, mais y appose cependant une ultra-sécheresse qui donne une couleur particulière à sa dimension militante (sécheresse qui se traduit par une absence de pathétique, par exemple : je me demande bien qui peut voir venir la résolution, tant l'enchaînement qui y mène est dépassionné - ce qui ne veut pas dire désinvesti). Pour le dire plus simplement, ça m'évoque encore une fois beaucoup la modernité : un rapport distant à la réalité, une façon d'approcher les protagonistes comme autant d'objets observés. J'ai ainsi l'impression d'un réalisateur en équilibre, le didactisme ambiant trouvant un jumeau inversé dans l'extrême littéralité du ton, comme si ces deux approches se disputaient la prise en charge de cette histoire, se neutralisant l'une l'autre.

Sembène réussit en tout cas vraiment un pan de son film : le dialogue qui naît de l'alternance entre l'abstraction discrète de l'appartement français (blanc, nu, linéaire, marqué par le silence et la parole à sens unique) et les flash-backs africains plus doux (discontinus, musicalisés, pris dans le liant de la voix-off continue). La façon dont le personnage de Diouana se referme, bloc de silence ambulant qui ne renvoie plus la balle aux interpellations pour laisser vagabonder sa pensée (répondant dans sa tête, se réfugiant dans les souvenirs), évoque en quelque sorte la posture du film vis à vis du drame qu'il raconte : un rejet en bloc du fait divers signifiant pour une approche presque conceptuelle, qui atteint son paroxysme lors des scènes du masque, objet-fil-rouge aux accents ancestraux devenu symbole identitaire, jusqu'à raccompagner le colon hors des terres.

Je conserve un gêne, dans l'ensemble : même si contrebalancée et canalisée, la caricature du trait est souvent pénible, la parabole politique est par de nombreux aspects naïve et facile. Mais globalement le film est convaincant, et surtout remarquable de précision pour un premier long.


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MessagePosté: 12 Mar 2012, 11:32 
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Schtroumpf sodomite
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Ma très médiocre et lamentable connaissance du cinéma africain se limite à deux films de Sembène (je compte pas Rouch) : Moolaadé et Camps de Thiaroye, que j'aime vraiment beaucoup. Je sais pas trop ce que tu entends pas "solide", mais je les trouve d'autant plus fort qu'ils sont extrêmement simples.

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MessagePosté: 12 Mar 2012, 19:31 
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Solide parce qu'impression d'un projet esthétique plus conscient et maîtrisé, là où Moolaadé avait parfois un côté illustratif un peu hasardeux. Dur d'être plus précis, vu que la vision de Moolaadé date (c'est le premier film africain que j'avais vu), et que j'ai toujours autant mal à faire le tri entre ce qui relèverait d'une esthétique de ces pays (que j'aurais alors du mal à résumer à de la simplicité), ou ce qui relèverait de carences et de maladresses (et non, ce n'est pas un appel à relancer la discussion...)

Sinon là j'essaie de trouver Kodou, les images qui traînent sur le net suggèrent un truc très bien.


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MessagePosté: 13 Mar 2012, 09:46 
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Schtroumpf sodomite
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Inscription: 22 Mar 2006, 22:43
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Localisation: Arkham Asylum
"Illustratif" c'est un qualificatif qui m'étonne beaucoup. Par "simple" j'entends direct, sans chichi, qui va droit au but (mais en prenant son temps, sans raccourcis). Je pense (mais ce n'est qu'une intuition) que c'est quelque chose de propre au cinéma africain. Et c'est ce que j'ai apprécié chez Sembène, cette capacité à ne pas s'embarrasser de petits effets de manche stylistiques ou à sur-dramatiser le récit. Il parle de chose grave sans gravité et n'hésite pas à emprunter la voix du téléfilm pour concentrer son regard sur ce qu'il a à dire (le revers pervers de la tradition) et à montrer (l'Afrique telle qu'elle est, loin du regard post-colonial) et dans ce cas précis, c'est la meilleure chose à faire. Camps de Thiaroye, j'ose même pas imaginer le gros pensum lourdingue (façon le dernier Kasso) que ça aurait été si ça avait été fait par des Français.

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MessagePosté: 13 Mar 2012, 09:56 
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"Illustratif" faute de mieux pouvoir comprendre l'intérêt d'un travail dont j'ai du mal à sentir les traces. Ce dont je parlais dans le topic associé : le fait que tous les points de montage arrivent en début de dialogue par exemple, que tout soit dit et expliqué texto par la parole, qu'il y ait justement un danger de pensum politique (si on le prend sans le remettre en perspective, le film ressemble quand même méchant à une démonstration scolaire didactique, tout comme La noire de... d'ailleurs). Là je joue au béta, je sais bien que c'est une vision déformée liée à mes habitudes de cinéma occidental, et que les points que j'énumère sont justement les signes d'une esthétique propre. Mais "la voie du téléfilm", j'ai du mal à considérer que ce soit valable, la simplicité que tu évoques ne peut se résumer à un désinvestissement de la mise en scène (parce que dans ce cas c'est un avis qu'on peut copier-coller sans y regarder mieux à tous les films du continent sur quarante ans)... Attention, je ne cherche ni de chichi, ni maniérisme, ni romantisation, encore moins d'exotisme, mais dans le cas de Moolaadé, je trouve ce dépouillement pas assez affirmé, pas assez "travaillé" en un sens, pour qu'il soit réellement efficace sur moi.

De toute façon c'est comme tout, les films centre-africains, tant que j'en aurais pas vu à la pelle, il sera dur de bien sentir comment cela marche.


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